Invesco: de quelle bulle parle-t-on ?

L'environnement de marché actuel présente des similarités avec les situations de bulle observées dans le passé.

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Cet article fait partie de la série "Perspective", qui regroupe des contributions externes. Le texte suivant a été rédigé par Bernard Aybran, directeur de la multigestion chez Invesco Asset Management.  

Dans le courant du premier trimestre, les marchés obligataires, habitués à tromper les oracles qui annoncent un krach depuis des années, ont progressé sensiblement pour la plupart d’entre eux.

Quant aux marchés actions, ils ont offert un couple rendement-risque peu agréable, à savoir très peu de performance pour un niveau de volatilité assez élevé sur les grands marchés actions. A tel point que le terme de « bulle » est revenu sur le devant de la scène pour qualifier les marchés financiers. Il est vrai que de multiples similitudes y font penser. Mais les différences sont plus importantes encore.

Au premier rang des similitudes avec la fin du vingtième siècle, l’envol des valeurs de biotechnologie ne peut que frapper : avec près de 3% de la capitalisation boursière américaine, leur poids est revenu au niveau de l’an 2000. Pis, avec 5% de la capitalisation, le poids des valeurs internet dépasse aujourd’hui nettement le niveau de ce que l’on avait appelé la « bulle internet ».

Autre (mauvais) souvenir : aux Etats-Unis, 80% des introductions en bourse du trimestre ont concerné des sociétés en perte. Par ailleurs, d’autres statistiques rappellent l’autre grande bulle financière des dernières décennies. Ainsi, une grande économie anglo-saxonne doit pour une bonne part sa croissance économique impressionnante au secteur de l’immobilier et à l’endettement des ménages. Cette affirmation s’applique aux Etats-Unis d’il y a dix ans. Mais aussi au Royaume-Uni actuel, où le nombre de logements construits en 2014 pourrait dépasser celui de 2007.

Plus généralement, les encours obligataires atteignent des sommets partout dans le monde et le chiffre de 1000 milliards de dollars a été dépassé récemment, en hausse de 40% par rapport au niveau de 2007, qui marquait pourtant l’entrée dans une crise de la dette.

C’est qu’il s’agit là d’un « marché » au sens le plus classique du terme, où se rencontrent une offre (des emprunteurs) et une demande (des prêteurs), toutes deux particulièrement abondantes. Et, depuis quelques trimestres, le rapport de force s’avère tout à fait biaisé en faveur des emprunteurs.

D’une part, la prime de risque (ou spread) payée par les emprunteurs a retrouvé pour de nombreux marchés les très faibles niveaux atteints il y a un an, qu’il s’agisse d’émissions high yield de sociétés privées ou d’émissions émergentes libellées en dollars. Outre les taux d’intérêt eux-mêmes, les conditions auxquelles les émetteurs s’endettent leur sont de plus en plus favorables : la quasi-totalité des crédits destinés à financer des achats avec effet de levier ont été octroyés avec des « clauses allégées », nettement moins protectrices pour les prêteurs et moins contraignantes pour les emprunteurs.

Certes : tout ce qui précède ne peut être nié et divers signes de surchauffe se font jour. En revanche, on ne peut omettre les grandes différences avec les deux précédentes bulles. A titre d’exemple, si le stock de dette augmente, les montants de trésorerie conservée par les sociétés atteignent eux aussi des niveaux jamais vus et la trésorerie dépasse les montants de dette qui arrivent à échéance, ce qui rend, en moyenne, les perspectives de défaut plus lointaines.

Du côté des marchés actions, loin de l’euphorie grand public qui caractérisait la fin du siècle dernier, les particuliers sont demeurés très en retrait ces dernières années et les flux d’achats sur les marchés actions provenaient largement d’institutions ou de fonds diversifiés, placements privilégiés par les particuliers dans de nombreux pays pour sortir de leurs placements non rémunérés.

Au final, s’il est difficile d’affirmer que les grands marchés actions sont sous-valorisés, ils sont plutôt, selon de nombreuses mesures, en ligne avec des niveaux moyens de valorisation sur les dernières décennies.

Dans le courant du mois de mars, les portefeuilles diversifiés multigérants Invesco ont maintenu les grandes orientations en place depuis plusieurs mois maintenant : des expositions actions assez élevées et des niveaux de cash faibles.

En termes de répartition géographique, les émergents demeurent quasi absents des portefeuilles alors que l’Europe est privilégiée. Dans le courant du mois de mars, les portefeuilles qui n’y étaient encore que peu exposés ont vu leurs positions en actions espagnoles accrues.

Du côté obligataire, les durations demeurent à des niveaux faibles ; tout en restant significatives, les positions high yield, hors dette de courte maturité, sont progressivement écrêtées à mesure que les rendements décroissent.

Pour les semaines à venir, les résultats des sociétés cotées devraient revenir au centre des préoccupations : la saison des résultats trimestriels commencera dans la seconde quinzaine du mois d’avril aux Etats-Unis, et une poursuite de la croissance des résultats s’avère toujours plus difficile, dans un contexte où les marges sont, en moyenne, proches de leurs plus hauts historiques.

Quant aux résultats européens, si la perspective de leur croissance se trouve repoussée toujours plus loin, ils ne seront connus que le mois prochain et ne devraient donc pas occuper les esprits, d’autant plus ouverts aux nouvelles macro-économiques.

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A propos de l'auteur

Invesco Asset Management

Invesco Asset Management  est une société de gestion de portefeuilles.