Embellie sur les marchés obligataires

Les investisseurs ont fait preuve d’un regain d’appétit pour le risque.

Mara Dobrescu 05.04.2012
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Après une année 2011 particulièrement difficile, les marchés obligataires semblent avoir retrouvé des couleurs début 2012, dans le sillage du rebond des marchés actions. Ce regain d’optimisme a été nourri par le LTRO (Long Term Refinancing Operation), programme d’injection massive de liquidités sur les marchés opérée par la BCE, qui a permis d’éloigner le spectre d’un assèchement du crédit. L’amélioration des conditions de crédit s’est tout d’abord traduite par un resserrement des « spreads » des obligations privées par rapport aux obligations gouvernementales. Mais ses effets se sont aussi fait sentir sur les taux d’intérêt de certains pays périphériques, et tout particulièrement de l’Italie : de fin décembre 2011 à fin mars 2012, le taux des obligations italiennes à 10 ans est passé de 6,8% à 5,12%. Les taux des pays « cœur » de l’Europe restent quant à eux sur une tendance de légère baisse, dans un environnement de croissance économique faible : les taux moyens à 10 ans des pays notés AAA de la zone euro (Allemagne, Pays-Bas, Finlande) sont ainsi passés de 2,7% à 2,56% sur le trimestre.

Ces nouvelles rassurantes ont contribué à atténuer la nervosité des marchés, qui ont par ailleurs bien accueilli la finalisation du plan PSI II (Public Sector Involvement) d’aide à la Grèce. Considéré comme un succès en raison de son fort taux de participation, il a été suivi par l’activation des CDS sur les obligations souveraines grecques, un mouvement largement anticipé par les marchés, et qui a donné, au moins pour l’instant, un temps de répit à la tragédie grecque.

Toutes les inquiétudes sur l’avenir de la zone euro ne se sont pas dissipées pour autant. La courbe des taux grecs postérieurs à 2024 continue à être inversée, suggérant que les marchés restent prudents sur la capacité des autorités grecques à réduire significativement leur endettement pour le long terme. A cela se sont ajoutées de nouvelles inquiétudes sur l’Espagne, qui a fait marche-arrière sur certains de ses engagements d’austérité, et qui n’a pour l’instant pas bénéficié des bonnes nouvelles ayant accompagné le reste de la zone euro. Les taux des obligations espagnoles à 10 ans n’ont ainsi presque pas baissé, de 5,4% à fin décembre 2011 à 5,3% fin mars 2011.

Le regain d’appétit des investisseurs pour le risque s’est naturellement traduit par de belles performances des catégories obligataires les plus rémunératrices mais aussi les plus risquées. En tête du palmarès, la catégorie Obligations EUR Haut Rendement, avec une performance moyenne de 7,6% sur le trimestre (elle avait perdu -1% en 2011) suivie des Obligations Privées EUR (5,5%). Les principales bénéficiaires ont été les financières grâce à l’amélioration de leurs conditions de refinancement via le LTRO. L’indice BarCap Euro Financials termine ainsi le trimestre sur une hausse de 7,4% contre un gain de 4% pour sa version hors financières. La moyenne de la catégorie Morningstar Obligations Diversifiées a quant à elle gagné 3,4% et la catégorie Obligations Gouvernementales EUR clôture le palmarès avec une hausse de 2,5% .

Les obligations internationales (sans couverture du risque de change) ont en revanche signé une performance décevante en euros (0,02%) qui contraste avec leur beau parcours enregistré en 2011 (6%). La principale raison tient à la forte exposition de bon nombre de ces fonds au dollar américain, qui s’est déprécié par rapport à l’euro au premier trimestre. Les fonds couverts en euros ou à dominante euro ont en revanche mieux tiré leur épingle du jeu (avec une performance de 2,7% et 2,25% respectivement).

Nom de la catégorie

Performance sur le premier trimestre 2012

Obligations EUR Emprunts Privés

5,52%

Obligations EUR Diversifiées

3,42%

Obligations EUR Emprunts d’Etat

2,47%

Obligations EUR Haut Rendement

7,64%

Obligations EUR Indexées sur l’inflation

3,32%

Obligations Internationales

0,02%

Obligations Internationales couvertes en euro

2,71%

Obligations Internationales dominante euro

2,25%

 

Au sein de la catégorie  Obligations EUR Haut Rendement, le fonds HSBC GIF Euro High Yield Bond (noté Silver) signe un très bon trimestre avec une hausse de 11,2%. Ce fonds de conviction affiche historiquement un portefeuille différent de la plupart des indices et des fonds concurrents, qui se caractérise notamment par la forte présence des subordonnées financières. Mieux notées, celles-ci affichent cependant des écarts de rendements aussi élevés que ceux des émetteurs «high yield», selon le gérant, Philippe Igigabel, qui n’a pas cessé de croire à leur potentiel. Même si ce positionnement a coûté en 2011, il a permis au fonds de profiter pleinement du rebond sur les trois derniers mois. Le fonds Allianz Euro High Yield (Bronze) se trouve également en tête du palmarès avec un gain de 10,6%. Son gérant, Alexandre Caminade, n’hésite pas à piloter tactiquement le niveau d’exposition du fonds (le béta) et à prendre des paris marqués sur le plan sectoriel et de la sélection des émetteurs. Là encore, son positionnement offensif l’a pénalisé en 2011, mais ces paris (notamment sur certaines subordonnées Tier 1) ont été maintenus et ont contribué aux bons résultats depuis le début de l’année.

Parmi les fonds investissant sur la dette privée (catégorie Obligations Emprunts Privés EUR), l’une des meilleures performances du trimestre revient au fonds Morgan Stanley INVF Euro Corporate Bond (Bronze) avec une hausse de 9,3%. Le fonds peut s’exposer aux obligations de qualité inférieure à BBB ou non notées (qui représentaient au total 16% de l’actif à fin janvier 2012), ce qui l’a aidé dans la période de rebond. Au contraire, les fonds au positionnement plus prudent ont eu plus de mal à tirer leur épingle du jeu. C’est par exemple le cas de LO Funds Euro Credit Bond (Neutre) (4,2%). Le fonds est géré avec une fourchette de tracking-error étroite (2%) et reste relativement proche de son indice, le Citi Euro Big ex-EMU Govt, qui comporte un tiers environ d’obligations dites «sécurisées», moins risquées mais aussi moins rémunératrices. Ceci lui confère un biais défensif, qui s’est révélé peu porteur au cours des trois derniers mois.

Au sein de la catégorie Obligations diversifiées EUR, comme l’on pouvait s’y attendre, les fonds ayant maintenu une surpondération sur le crédit ont globalement affiché une belle progression. C’est notamment le cas du fonds HSBC GIF Euro Bond (Bronze), avec 4,47% sur la période. Le fonds était en effet exposé à hauteur de 30,7% aux obligations privées à fin février 2012 (soit 12% de plus que leur poids dans l’indice BarCap Euro Aggregate). Parmi les gagnants, on compte aussi le fonds Raiffeisen Euro Rent (Gold) (4,2%), qui a bénéficié de sa nette sous-pondération des obligations gouvernementales (35% de l’actif à fin mars 2012) et du fort pari sur les financières, qui représentaient 40% à cette même date. A l’inverse, Carmignac Sécurité (Bronze) signe un trimestre décevant avec à peine 2,2% contre 3,4% pour la catégorie. L’absence d’exposition à l’Italie, combinée à une duration plus courte que celle de la plupart des fonds concurrents, s’est révélée pénalisante dans un contexte de nette baisse des taux italiens.

Parmi les fonds d’Obligations gouvernementales EUR, l’une des meilleures performances de la catégorie revient à HSBC Euro Gvt Bond (Silver), avec 3,9%. Le gérant, Michel Antonas, a choisi de prendre des profits sur l’Italie après le mouvement de resserrement des spreads enregistré en février, ce qui a contribué à sa surperformance. Le fonds bénéficie également de frais très compétitifs (0,42%), parmi les moins chers de sa catégorie. C’est également le cas du fonds Petercam Bonds Eur (Silver), qui a réussi au premier trimestre 2012 à combler une partie du net retard accumulé l’an dernier, avec un gain de 3,7%. Ce fonds de conviction se distingue par une gestion active de la duration et du positionnement sur la courbe des taux, deux leviers de performance qui ont ajouté le plus de valeur sur le trimestre. L’allocation pays a quant à elle été neutre, l’effet positif de la surpondération sur l’Italie ayant été contrecarré par la surexposition à l’Allemagne et le maintien d’une position sur la Grèce.

Enfin, au sein des Obligations Internationales, l’une des meilleures performances revient au fonds Petercam L Bonds Universalis (Bronze) avec 4,47%. L’exposition aux subordonnées financières internationales (qui représentaient 25% du portefeuille à fin février 2012, proche du maximum autorisé par le processus de gestion) a été bénéfique, de même que les paris sur certaines devises émergentes comme le Rand sud-africain (6,5% de l’actif à fin février 2012). A contrario, Loomis Sayles Global Opp. Bond (Bronze) signe une performance nettement moins enthousiasmante avec 0,6%. La politique d’exposition aux devises n’a pas été couronnée de succès, le fonds étant resté sous-exposé à l’euro au cours du trimestre, ce qui ne lui a pas permis de tirer profit de l’appréciation de celui-ci par rapport au dollar.

A fin mars 2012, la recherche qualitative de Morningstar couvre 19 fonds dans la catégorie Obligations Gouvernementales EUR, 34, dans la catégorie Obligations Diversifiées EUR, ainsi que 33 dans la catégorie Obligations Privées EUR et 16 au sein de la catégorie Haut Rendement EUR. Pour retrouver la liste de tous les fonds notés, cliquez ici. 

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A propos de l'auteur

Mara Dobrescu

Mara Dobrescu  est analyste Fonds chez Morningstar France