Devises émergentes : d’où vient la volatilité ?

Plusieurs facteurs économiques et monétaires ont contribué à la chute de nombreuses devises émergentes.

Jocelyn Jovène 19.11.2015
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La divergence des politiques monétaires des grands pays développés, le ralentissement de l’économie chinoise et la chute du cours de nombreuses matières premières ont largement contribué à la volatilité des devises émergentes. Mais ce ne sont pas les seuls facteurs à prendre en compte.

Selon une étude du Peterson Institute for International Economics, basé à Washington, publiée début novembre, la chute des devises a eu comme contrepartie l’envolée du dollar. Le taux de change réel (REER) du billet vert s’est ainsi apprécié de 15%, ce qui pourrait amputer un demi-point de pourcentage au rythme de croissance de l’économie américaine au cours des cinq prochaines années.

L’autre source de volatilité pour les devises émergentes est la montée de l’aversion au risque, elle-même provoquée par la perspective d’une remontée des taux directeurs de la Fed aux Etats-Unis. Entre 2007 et 2008, le taux directeur de la Fed est passé de 5,26% à 0,16%, puis est resté à ces niveaux au cours des presque sept années suivantes.

Les investisseurs étant toujours en quête de rendement, la remontée des taux directeurs pourrait entraîner des flux de capitaux hors des pays émergents vers les Etats-Unis. Cette crainte s’est déjà traduite par un mouvement de hausse sur les dérivés de crédit (CDS), qui servent d’instrument de protection contre un défaut des émetteurs de dette issus des pays émergents.

La décision de la Chine de dévaluer sa devise dans la perspective de son inclusion dans le panier des droits de tirage spéciaux du Fonds monétaire international (FMI) a également été une source de volatilité. La Chine a d’ailleurs dû puiser dans ses devises pour faire face à un mouvement de panique sur les marchés et à d’importantes sorties de capitaux.

Il est intéressant de noter que pour le PIIE, la volatilité des devises émergentes, citée par de nombreuses entreprises comme une source de risque importante ces derniers mois, n’est pas le problème le plus important.

« Une surévaluation du dollar d’environ 10% au-dessus du taux de change réel est le principal déséquilibre qui attend l’économie internationale », écrit William R. Cline, auteur de l’étude. Si le déficit courant est attendu à 2,6% du PIB en 2015, il pourrait glisser vers 4,6% d’ici 2020, voire 5% si le dollar continue de s’apprécier.

Il revient donc à la Fed d’intégrer ce risque dans le rythme de resserrement de sa politique monétaire. Il revient aussi aux pays membres du G20 de maintenir leur engagement à ne pas s’engager dans une guerre des monnaies, alors que de nombreuses banques centrales, en particulier dans les pays développés, ont eu tendance à adopter des politiques visant clairement à faire regagner leurs économies en compétitivité – un jeu auquel la Chine, encore atelier du monde, s’est abstenu de participer jusqu’ici.

Pour aller plus loin

L'institut Peterson maintient un tableau des taux de change effectifs réels des principales devises sur son site Internet.

Il peut égalemnt être téléchargé à l'adresse suivante.

 

 

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A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.