Qu’est-ce qui explique la performance d’une action ? -1-

Quels sont les moteurs de performance qui contribuent à la variation du cours de Bourse d’une entreprise ?

Jocelyn Jovène 16.07.2014
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La performance d’une action en Bourse, voire d’un indice est rarement déterminée par un seul facteur, mais par tout un ensemble d’éléments dont il faut connaître l’existence et le rôle.

Nous vous proposons de décortiquer les différents moteurs de performance de la Bourse et d’illustrer notre propos à partir des données portant sur la Bourse européenne, à travers l’indice Stoxx Europe 600. Cette approche a l’intérêt de lier « fondamentaux » et facteurs psychologiques à l’évolution du cours de Bourse.

Dans cette série de deux articles, nous allons tout d’abord nous attacher à retracer l’évolution des marchés européens depuis une dizaine d’années, à travers les principales composantes de la performance d’un titre ou d’un indice, puis nous regarderons dans le détail l’articulation des différents facteurs.

L’histoire de la Bourse depuis 2003 peut être décomposée en différentes phases historiques :

  • 2000-2003 : éclatement de la bulle Internet ou « TMT », sur fond de récession entre 2001-2002 et phase d’assainissement des bilans des entreprises.
  • 2003-2007 : sur fond de reprise économique et de croissance soutenue des marchés immobiliers de nombreux pays développés, ainsi que la montée en puissance des marchés dits « émergents ».
  • 2007-2009 : éclatement de la bulle financière et crise des subprimes, faillite de Lehman Brothers (15 septembre 2008), menaces sur le système financier mondial (crise systémique), chute du PIB et du commerce mondiaux ; intervention massive des banques centrales et des gouvernements sous l’égide du G20.
  • 2009-2011 : première phase de rebond interrompue par la crise de la dette de la zone euro qui fait replonger les indices boursiers, sur fond de craintes d’implosion de la zone euro et de mise en place de mesures d’austérité qui brident la croissance de nombreux pays.
  • 2012-2014 : intervention de la BCE à l’été 2012 (« whatever it takes » de Mario Draghi), éloignement des craintes de risque systémique en zone euro sur fond de retour à une croissance modeste.

 

Source: Factset, Morningstar. BPA: bénéfice par action publié l'année précédente).

Au plan boursier, ces différentes phases se sont traduites par les évolutions suivantes :

  • 2003-2007 : après l'éclatement de la bulle et la chute des profits, le rebond de la Bourse est porté principalement par la croissance attendue des résultats des entreprises (le bénéfice par action publié du Stoxx 600 passe de 15,11€ en 2003 à 28,80€ en 2007) et par une légère appréciation des multiples de valorisation. Cette hausse des indices plus rapide que celle des profits se traduit aussi par un recul du rendement du dividende.
  • 2007-2008 : la crise de subprimes entraîne une chute des indices et une compression des multiples de valorisation, mais pas d’évolution des anticipations de résultats. Le rendement du dividende remonte fortement.
  • 2008-2009 : la crise systémique provoquée par la chute de Lehman amplifie la baisse des indices boursiers, et entraîne de fortes révisions en baisse des prévisions de résultats par les analystes. Le rendement du dividende évolue positivement, mais pour de mauvaises raisons (les anticipations de profits baissent moins vite que les cours).
  • 2009-2011 : la sortie de crise se traduit par une remontée brutales des indices boursiers, laquelle s’appuie à la fois sur une expansion des multiples et un redressement des profits des entreprises, et par une contraction du rendement du dividende (de 5,8% à 3,7%).
  • 2011-2012 : la crise de la dette en zone euro mine de nouveau les marchés : les indices rechutent, les anticipations de résultats sont inchangées (25,57€ en février 2011 ; 24,96€ en juillet 2012), et les prévisions de rendement du dividende se redressent.
  • 2012-2014 : nouvelle phase de hausse du marché. Alors que la croissance dans les pays développés se stabilise, la hausse des indices s’explique exclusivement par l’expansion des multiples de valorisation, alors que les prévisions de résultats sont légèrement revues à la baisse ; logiquement le rendement du dividende recule également.

 

Source: Factest, Morningstar.


Aujourd’hui, les multiples de valorisation des actions européennes sont raisonnables, mais plus bon marché comme ce fut le cas en 2009 ou en 2011 – années qui constituaient des opportunités historiques d’entrer sur les marchés mais que bien peu d’investisseurs ont saisies.

Sur la base du consensus Factset, le P/E 2015 du Stoxx 600 est actuellement de 13,6x contre une moyenne de 12,2x (sur la période 2001-2014).

Selon ce même consensus, les profits des entreprises devraient croître de 14% l’an prochain – ce qui semble toutefois très optimiste au regard de l’environnement économique, guère plus favorable aujourd’hui que l’an dernier et malgré les espoirs d’une reprise plus dynamique de l’activité l’an prochain.

Bref, il est difficile d’affirmer que les actions européennes sont hors de prix – c’est d’ailleurs l’argument des experts de Morningstar – mais les investisseurs doivent faire attention à ce qu’ils achètent, et surtout au prix qu’ils paient pour accompagner les entreprises auxquelles ils croient.

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A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.