Consolidation dans l’exploitation des mines d’or

En raison de la hausse record du prix de l’or, les opérations dans le secteur de l’exploitation des mines aurifères se multiplient.

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Les rachats de taille qui ont eu lieu dernièrement dans le secteur de l’exploitation des mines d’or (Lihir Gold par Newcrest et Sino Gold par Eldorado Gold) ont attiré l’attention sur des éléments intéressants comme, par exemple, les critères rendant une entreprise attrayante dans le cadre d’un rachat. Ces leçons permettent de découvrir de nouveaux candidats potentiels à la reprise.

L’augmentation des réserves constitue la raison essentielle incitant un exploitant de mines aurifères à racheter l’un de ses concurrents. L’extraction de minerai réduit les réserves des entreprises d’exploitation minière. Celles-ci doivent, pourtant, être remplies pour garantir la production. Ce besoin permanent se fait surtout sentir dans les grandes entreprises qui puisent dans leurs réserves rapidement et en grandes quantités. Tandis que, pour augmenter leurs réserves, les exploitants miniers ont choisi d’extraire eux-mêmes de nouveaux minerais ou de mettre la main au portefeuille, la plupart préfère acheter des réserves sur le marché, vu les exigences sévères en termes de capital et de temps ainsi que l’incertitude non négligeable inhérente à l’exploration.

L’offre publique d’achat majorée, d’un montant de 8,8 milliards de dollars (6,7 milliards d’euros), proposée en mai dernier à Lihir Gold (CLIQUER ici pour consulter la fiche valeur)par la première société aurifère australienne Newcrest Mining, constitue l’une des plus importants opérations de ces dernières années dans le secteur de l’exploitation de mines d’or. Cette affaire sera probablement conclue cet automne. Lihir est une société cible particulièrement attrayante aux yeux de Newcrest, et ce, pour plusieurs raisons. Cette entreprise détient en effet Lihir Island, une mine de classe mondiale disposant d’une réserve d’or de 31 millions d’onces (environ mille tonnes).

En clair, l’une des plus importantes réserves d’or du monde. En outre, Lihir produit à coûts réduits, ce qui permet à l’association de Newcrest et Lihir de rester dans le quartile inférieur de la courbe des dépenses sectorielles. La majeure partie des réserves de Lihir se trouve en Papouasie-Nouvelle-Guinée, un pays où Newcrest est également très présent. La proximité géographique des mines de Lihir rend celle-ci incontestablement intéressante aux yeux de Newcrest et lui permettra d’augmenter son rendement grâce à son infrastructure déjà présente dans ce pays et son expérience sur place.

Le rachat, en décembre 2009, de Sino Gold par Eldorado Gold pour un montant de 1,9 milliard de dollars (1,4 milliard d’euros) représente une autre belle acquisition. À cette époque, Eldorado doubla quasiment ses réserves d’or grâce à cette opération. Eldorado, déjà propriétaire de la mine Tanjianshan, acheta, en effet, deux mines supplémentaires, ce qui lui permit de consolider ses activités en Chine. Dans cette optique, Eldorado poursuivit le même objectif que Newcrest.

Dans le cadre de cette reprise, il convient de souligner qu’Eldorado détenait déjà environ 20 pour cent des actions ordinaires de Sino avant d’envisager son rachat. Ce procédé est devenu de plus en plus fréquent dans les accords récents survenus dans le secteur de l’exploitation de mines d’or. En effet, les grandes entreprises d’exploitation minière acquièrent souvent une participation minoritaire dans une société cible potentielle ou entament une collaboration dans le cadre de l’exploitation minière et le développement de projets. Il s’agit là d’un signe avant-coureur d’un rachat proprement dit.

Cette tactique permet au chasseur d’apprendre à mieux connaître et évaluer sa proie, ce qui oriente sa décision de racheter ou non la société cible. Cette stratégie facilite également le processus de rachat. Le chasseur a, en effet, déjà dégagé du capital pour prendre une participation minoritaire dans les avoirs ou les actions de sa proie et il ne lui reste plus qu’à acheter le reste. En d’autres termes, l’acquéreur peut échelonner le montant du rachat au lieu de le débourser en une fois, ce qui allège considérablement la charge financière.

Candidats à la reprise

Il ressort des rachats récents précités que les entreprises d’exploitation minière disposant de solides réserves bon marché et situées à proximité des mines appartenant à des repreneurs potentiels constituent des cibles attrayantes. Il convient également de constater que l’acquisition d’une participation minoritaire ou l’instauration d’une collaboration entre d’importants exploitants miniers et des concurrents plus modestes annonce souvent un rachat. Ces critères permettent de distinguer trois candidats à la reprise potentiels (parmi les entreprises d’exploitation minière suivies par Morningstar).

Kinross Gold, importante entreprise d’exploitation minière, possède, en copropriété, un grand nombre de ses mines avec des géants du secteur, dont le plus important est Barrick Gold. Kinross et Barrick ont tissé, ces dernières années, des liens étroits, dans le cadre, notamment, du développement d’une réserve importante d’or et de cuivre à Cerro Casale, au Chili. Les gigantesques réserves de Kinross et ses coûts de production inférieurs à la moyenne en font une société cible intéressante pour une entreprise d’exploitation minière suffisamment solide pour pouvoir l’absorber. C’est là que le bât blesse.

En effet, le rachat de Kinross n’est pas une mince affaire, même pour un géant tel que Barrick. Barrick a, en effet, besoin d’importants capitaux pour ses propres mégaprojets comme Pueblo Viejo (République dominicaine) et Pascua-Lama (Chili), et il ne pourrait décemment pas lancer, en plus, une offre publique d’achat sur Kinross. Un échange d’actions constituerait un scénario plus évident. En février dernier, Barrick a acquis une participation de 25% dans le projet Cerro Casale de Kinross pour plus de 470 millions de dollars (359 millions d’euros).

IAMGold, qui est copropriétaire de plusieurs mines d’or en Afrique occidentale avec AngloGold, Ashanti et Gold Fields constitue un candidat à la reprise plus crédible. IAM Gold possède plusieurs mines en Amérique latine et au Canada et se situe approximativement au milieu de la courbe des dépenses sectorielles.

L’entreprise présente, néanmoins, un profil en matière de dépenses bien meilleur qu’AngloGold et GoldFields qui possèdent des mines relativement onéreuses en Afrique du Sud. Tant AngloGold que GoldFields ont annoncé leur volonté de se diversifier par rapport à leurs activités minières d’Afrique du Sud, et le rachat de IAMGold pourrait déjà être considéré comme une première étape. La très lucrative mine de nobélium de IAMGold rend celle-ci encore plus attrayante. Le nobélium est principalement utilisé dans des superalliages et son extraction est très rentable. A l’échelle mondiale, 3 entreprises seulement produisent du nobélium et IAM Gold leur a revendiqué une part de marché de 13 pour cent en 2009.

Le profil d’IAM Gold convient particulièrement bien à AngloGold car celle-ci possède déjà des mines au Mali et au Ghana, deux pays dans lesquels IAMGold est déjà bien présent. L’affaire est pourtant loin d’être réglée. Ainsi, AngloGold doit consacrer une partie de ses fonds à réduire son énorme couverture en or qui s’élevait, fin mars, à 3,5 millions d’onces (plus de 100 tonnes). L’entreprise souhaite également controler son taux d’endettement, ce qui rend peu vraisemblable la contraction d’autres dettes importantes. Si AngloGold lance une offre publique d’achat sur IAMGold, celle-ci sera, dès lors, très probablement financée au moyen d’une émission d’actions, ce qui peut entraîner une dilution pour les actionnaires actuels.

Enfin, Harmony Gold est également candidat à la reprise. Cette entreprise possède, conjointement avec Newcrest via la joint venture Morebe, un portefeuille éclectique composé principalement de mines sud-africaines onéreuses et de quelques avoirs en Papouasie Nouvelle-Guinée. En raison de ses implantations en Afrique du Sud, les coûts de production d’Harmony sont largement supérieurs à la moyenne du secteur d’exploitation de mines d’or. La joint venture Morebe représente, en revanche, un avoir très intéressant grâce à ses coûts de production peu élevés et à son potentiel de croissance séduisant. Vu l’intérêt historique de Newcrest pour la Papouasie-Nouvelle-Guinée (voir l’acquisition de Lihir), il ne serait pas étonnant que le numéro un australien des mines d’or rachète la participation d’Harmony dans la joint venture.

Une offre globale sur Harmony n’est pas aisée car les mines de cette entreprise situées en dehors de la Papouasie-Nouvelle-Guinée ne sont pas vraiment intéressantes. En outre, Newcrest est toujours en train de régler les derniers détails du rachat de Lihir. Avec l’offre de Newcrest sur Lihir en fil conducteur (ce qui porte la réserve de Lihir à 280 dollars par once environ), la participation d’Harmony – à savoir 50% dans Morebe – s’élève à environ 300 millions de dollars (230 millions d’euros). La découverte de nouvelles réserves dans la mine pourrait, toutefois, entraîner une majoration conséquente du prix de rachat définitif.

Dessert

Certains investisseurs ont bien profité de la tendance à la consolidation survenue dans le secteur de l’exploitation de mines aurifères. Les investisseurs doivent se concentrer sur des producteurs d’or pratiquant des coûts de production relativement bas – ces entreprises maintiennent, ce faisant, leur rentabilité, même si les prix de l’or reviennent à leur niveau élevé actuel – et disposant d’une réserve d’or rentable garantissant la production à long terme. Chaque bénéfice supplémentaire résultant d’un rachat éventuel constitue, dans ce cas, la cerise sur le gâteau.

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A propos de l'auteur

Joung Park  Joung Park is an equity analyst with Morningstar.