Le coronavirus, la Fed et le faut départ de 2020

La décision de la Fed place les banques dans une situation difficile, estime Eric Compton.

04.03.2020
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Du point de vue économique, le début de 2020 ne semblait rien présager d’anormal.

Certes, le ralentissement de la production manufacturière dans certaines régions du monde et la décélération générale – bien que modérée – de la croissance du PIB mondial demeuraient des préoccupations quotidiennes, tout comme la question de savoir si l’inflation finirait un jour par repartir à la hausse.

Il n’y avait là rien d'autre, cependant, que l’expression journalière d'inquiétudes économiques ordinaires à l’orée d'une année qui s'annonçait paisible. La flambée de maladie à coronavirus 2019 (COVID-2019) a rebattu les cartes de façon spectaculaire.

Prenant officiellement acte de l'évolution des risques, la Réserve fédérale a abaissé le taux cible des fonds fédéraux de 50 points de base, pour le ramener dans une fourchette de 1 à 1,25 %.

Le 28 février, la Fed avait publié une déclaration dans laquelle elle indiquait surveiller de près la situation et se tenir prête à « prendre les mesures appropriées pour soutenir l’économie ».

Selon les marchés, la banque centrale envoyait là un signal direct de baisse imminente des taux, et la suite leur a donné raison puisque la Fed a annoncé le 3 mars au matin, dans un bref communiqué, une réduction de 50 points de base de son taux cible. Cette décision a été votée à l’unanimité.

Nos perspectives initiales en matière de taux, dans le cadre de notre couverture du secteur bancaire, ne tablaient pas sur cette baisse. Avant que l’épidémie ne se déclare, nous anticipions une stabilité des taux en 2020. La décision de la Fed place les banques dans une situation difficile.

Le taux LIBOR en dollar moyen a déjà diminué d’environ 60 points de base depuis janvier et le rendement du bon du Trésor américain à 10 ans a reculé de quelque 80 points de base depuis le début de l’année. Quel que soit l’impact qu'aura finalement le coronavirus sur l’économie, la baisse des taux que la Fed vient d'annoncer pèsera sur les bénéfices des banques.

Si l’épidémie s’avère très préjudiciable à l’économie, cela constituera un facteur négatif supplémentaire. Les banques n’ont aucun moyen de s’en sortir indemnes. Nous intégrerons les nouvelles perspectives de taux dans notre couverture habituelle des banques et nous pensons que nos estimations actuelles de juste valeur pourraient en moyenne connaître une baisse située dans la plage inférieure de pourcentages à un chiffre.

L’annonce de la Fed a été la première décision officielle de politique monétaire prise en réaction à l’épidémie. D’autres gouvernements ont pris des initiatives similaires et certains, à Hong Kong et Italie par exemple, ont même commencé à mettre en œuvre des mesures budgétaires. Les États-Unis n’ont pour l'instant pas agi sur le front budgétaire.

Nous tenons à souligner qu’une grande incertitude demeure. Nous ne savons pas combien de temps les taux resteront bas, ni si la Fed procédera à d'autres baisses.

Nous ne savons pas non plus quel sera effectivement l'impact de la COVID-2019 sur l'économie mondiale de manière générale, ni sur l'économie américaine en particulier.

Dans le pire des cas, les chaînes d'approvisionnement pourraient être paralysées, les ménages pourraient s’arrêter de consommer et une récession pourrait être imminente.

Les banques pourraient pâtir d’une chute conjuguée des taux et de l’activité, couplée à une hausse des coûts du crédit. D’autres issues moins défavorables sont cependant possibles.

Il est difficile de prédire le rythme et l’ampleur ultimes de la propagation de la maladie, ou la manière dont les populations y réagiront. Les banques deviennent meilleur marché, mais aucune ne nous semble encore mériter 5 étoiles.

Il est nécessaire que les investisseurs aient bien conscience des risques propres aux banques. Le scénario du pire n’est à notre avis pas encore pleinement intégré par le marché, mais si la propagation du virus finit par être contenue, l'impact économique pourrait être limité et les cours d’aujourd'hui auront constitué de bons points d’entrée.

Les médias regorgent d’informations sur le coronavirus et il nous semble utile de rappeler les quelques points clés nous avons connaissance à ce stade. La COVID-2019 est désormais présente dans le monde entier et des cas de « contagion communautaire » ont été recensés aux États-Unis.

C’est un fait important car une fois que le virus circule dans la collectivité, sa propagation devient de plus en plus difficile à contenir. À l’heure où nous écrivions ces lignes, la présence du virus avait été confirmée dans 10 États par les autorités sanitaires (Center for Disease Control).

À la lumière des déclarations du CDC et de l’École de santé publique d’Harvard, nous ne savons pas si le nombre de cas diminuera aux États-Unis avec l’arrivée des beaux jours, ce qui se produit avec des virus similaires, par exemple avec la grippe.

Par ailleurs, les données relatives à la COVID-2019 sont assez nouvelles et évoluent donc beaucoup d'un jour à l’autre. Selon la cartographie en temps réel proposée par Johns Hopkins, 92.312 cas avaient été recensés dans le monde et 3.131 malades étaient décédés au moment où nous rédigions cet article. Sur la base de ces chiffres, le taux de mortalité serait d’environ 3%.

D’après les travaux de chercheurs du Centre chinois de prévention et de contrôle des maladie publiés en février par le Journal of American Medical Association, le taux de mortalité de la COVID-19 serait d’environ 2,3% et celle-ci serait plus contagieuse que le SRAS ou le MERS, mais également moins mortelle (les taux de mortalité du SRAS et du MERS s'établissant respectivement à 9,6% et 34,4%).

 

 

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