Combien d’Europe dans une allocation ?

La valorisation et l'aversion au risque sont des éléments déterminants à prendre en compte.

Jocelyn Jovène 22.10.2015
Facebook Twitter LinkedIn

Après la performance des actions européennes depuis 2012 et la chute des rendements obligataires, les investisseurs ont-ils encore intérêt à s’exposer aux actifs européens dans une allocation diversifiée ?

La réponse divise les observateurs.

La dernière enquête de Bank of America Merrill Lynch montre une nette surpondération des actions dans les allocations globales, avec une préférence pour l’Europe et le Japon au détriment des Etats-Unis et du monde émergent. La classe d’actif obligataire est sous-pondérée, tout comme les matières premières.

Cet été, l’univers du crédit a offert quelques frayeurs aux investisseurs, notamment au sein du haut rendement américain. La remontée des spreads de crédit peut aujourd’hui constituer une opportunité, à condition d’être très attentif au risque de défaut, qui a lui aussi remonté.

Au sein du crédit de qualité (« investment grade »), certaines opportunités semblent également émerger, mais sur des entreprises dont l’activité est plus orientée vers les marchés domestiques, en faisant l’hypothèse que la reprise économique en Europe va s’installer durablement.

La valorisation des actions européennes est toujours attrayante en relatif, mais en absolu, les investisseurs doivent se montrer sélectifs, rappellent les experts de Morningstar Investment Management.

Si l’on regarde l’allocation d’un fonds comme BGF Global Asset Allocation Fund (noté « Gold » par la recherche Morningstar), l’Europe représente un peu moins de 17% de l’allocation contre près de 23% pour l’indice de référence, faisant apparaître une certaine prudence du gérant, en particulier sur les obligations en euro.

Ce dernier a une part significative de liquidités (22%) et fait apparaître une nette préférence pour les actions japonaises (10,5% dans le fonds contre 4,6% pour l’indice de référence).

Cette analyse est relativement proche de celle des experts de Morningstar Investment Management, qui ne voient pas les actifs européens générer un rendement très élevé sur le long terme, au regard de leur valorisation actuelle, des perspectives de retour à la moyenne des marges et du revenu (coupon/dividende).

Pour les investisseurs internationaux, notamment américains, l’Europe reste un marché de niche. Leur allocation est le plus souvent pilotée par leur appréciation du risque économique lié à la zone euro (le cycle repart-il ou y a-t-il un risque de récession ?), mais également par les politiques des banques centrales qui pèsent tant sur les taux d’intérêt que sur l’évolution de la devise domestique.

Enfin, si l’on regarde le modèle d’allocation d’une grande banque d’affaires comme Morgan Stanley, ses stratégistes semblent actuellement marquer une préférence pour les actions européennes et japonaises, une légère surpondération sur le crédit européen et une grande prudence sur le Bund.

Ce positionnement s’inscrit d’ailleurs dans la perspective d’un rallye de fin d’année qui serait alimenté par la résistance de la conjoncture dans le monde développé (à l’abri donc d’un ralentissement du monde émergent – une thèse assez disputée), la stabilisation de la croissance en Chine, des valorisations attrayantes (également sujet à débat) et des indicateurs techniques (aversion au risque par exemple) favorables.

Au final, le plus important dans la construction d’une allocation reste la valorisation d’une classe d’actifs. De ce point de vue, les classes d’actifs les plus décotées sont aussi celles qui sont aujourd’hui très risquées (actions et dette émergente, actions japonaises).

Outre la capacité à choisir de telles classes d’actifs très décotées, c’est aussi de patience que les investisseurs doivent aujourd’hui être en mesure de faire preuve.

Facebook Twitter LinkedIn

A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.