Correction : les brokers veulent voir le verre à moitié plein

La baisse des marchés est d’une ampleur que plusieurs courtiers considèrent comme excessive.

Jocelyn Jovène 17.10.2014
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La baisse brutale des marchés financiers depuis un mois a pris de court de nombreux courtiers qui comptaient sur l’intervention de la BCE et sur la baisse de l’euro pour soutenir les résultats des entreprises et les cours de Bourse.

Malheureusement, la morosité des dernières statistiques économiques et l’évolution défavorable des flux ont eu raison des marchés, tandis que les « profit warnings » tendent à se multiplier (Cf. les cas de Rolls-Royce ou de Sulzer).

Les courtiers actions, qui vivent de l’intermédiation et des flux de transactions en Bourse, pensent toutefois que le mouvement a été excessif et qu’il pourrait bientôt toucher à son terme.

Les flux en première ligne

Pour les stratégistes de Barclays, « le sentiment et les flux de fonds ont exagéré le mouvement de baisse, et bien que les fondamentaux se sont un peu détériorés, les marchés actions sont allés trop loin. »

« Les estimations à douze mois du consensus sur le chiffre d’affaires et les résultats remontent et notre évaluation suggère que le déclin de la devise européenne contrebalancera une croissance domestique plus faible », ajoutent-ils dans une note datée du 17 octobre.

Chez UBS, on estime que la correction est essentiellement expliquée par des éléments techniques. « Avec le rallye obligataire et la chute des actions, il faudrait une révision en baisse de 29% des prévisions de résultats aux Etats-Unis pour ramener la prime de risque actions en ligne avec sa moyenne de long terme (40% en Europe). Cela (aussi) nous semble excessif », explique la banque suisse dans une note.

Décote de valorisation

Selon les données du consensus, les valeurs composant l’indice Stoxx Europe 600 se traite sur la base d’une P/E à 12 mois de 12,9x contre 13,7x début octobre. Entre temps, l’indice a perdu 10%, tandis que les anticipations de résultats à 12 mois n’ont été revues en baisse que de 0,7% pour le moment.

Selon les données de la recherche actions de Morningstar, le ratio cours sur juste valeur se situait à 0,91x sur la base des cours de clôture de jeudi, soit une légère décote qui se compare à un ratio de 0,96x pour l’ensemble des valeurs couvertes par les analystes.

« Nous pensons que les investisseurs sont trop pessimistes sur la croissance : la chute du prix des matières premières et le dollar plus fort aident à redistribuer la croissance mondiale », observent les stratégistes de Credit Suisse.

Bientôt la capitulation

La question qui se pose alors logiquement est : est-on à un point d’entrée sur le marché ? D’un strict point de vue de valorisation, cela semble le cas.

Mais si la correction est surtout liée à un mouvement de flux, il faudra sans doute attendre la fin de ce dernier pour pouvoir s’exposer avec un peu plus de confiance aux actions.

Selon Bank of America Merrill Lynch, un mouvement de stabilisation des sorties de capitaux des actions aurait été récemment observé : la décollecte aurait atteint 2 milliards de dollars récemment après 23 milliards de dollars de décollecte au cours des deux semaines précédentes.

La banque parle même de « capitulation », soit l’idée que les investisseurs, découragés par la baisse des cours, ne souhaitent plus s’y exposer à nouveau. Cette situation s’illustre par un certain nombre d’indicateurs techniques, lesquels indiquent justement qu’il peut être intéressant de revenir sur les actions, contrairement au sentiment général des investisseurs.

Facteurs de risque

Pourtant, si les courtiers soulignent le caractère excessif de la correction, ils n’oublient pas de rappeler qu’il existe encore des éléments de risque qui pourraient faire replonger les indices.

Parmi les risques identifiés par Credit Suisse, figurent notamment la situation de l’économie chinoise où le risque de correction immobilière serait toujours présent, même si très suivi par les autorités. Figure aussi les craintes de difficultés sur le marché du haut rendement, qui avait bénéficié d’importants flux jusqu’à l’été dernier.

Autre risque pointé par les stratégistes d’UBS : le déclenchement d’anticipations auto-réalisatrices. « Un espace clef à surveiller est le crédit. Nous avons écrit régulièrement que la classe d’actifs est chèrement valorisée, d’où un potentiel de correction. Nous avons également souligné le fait que l’illiquidité du maché est un risque central », observent-ils.

 

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Valeurs citées dans l'article

NomValeurVariation (%)Notation Morningstar
Rolls-Royce Holdings PLC421,10 GBX3,80Rating

A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.