Va-t-on vers un krach obligataire ?

Pour l’instant, ce n’est pas un scénario à privilégier.

Eric Jacobson 20.12.2016
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Cet article a été initialement publié sur www.morningstar.com le 15 décembre dernier. Il a été édité.

La Fed a réuni son comité de politique monétaire la semaine dernière pour décider la première hausse de taux de l’année, et la seconde depuis décembre 2015, avec un taux directeur compris entre 0,50% et 0,75%. Une annonce déjà bien anticipée par le marché.

La surprise est venue du commentaire indiquant que la banque centrale américaine anticipe trois hausses de taux l’an prochain, soit un rythme plus « agressif » que ce que de nombreux observateurs attendaient. Cela a conduit un rebond des rendements américains à deux ans, tandis que les échéances plus longues ont légèrement progressé.

Aussi importante soit la nouvelle, il est important de prendre un recul et refaire le film de l’année. Les marchés actions ont connu quelques séances mouvementées, mais au final, l’indice S&P 500 a gagné près de 13% cette année. A l’inverse, les marchés obligataires ont souffert. Le rendement à 10 ans a rebondi depuis le milieu de l’année, produisant une perte de près de 9% (entre le 8 juillet et le 12 décembre).

Quelques observations intéressantes toutefois. Malgré le rebond des rendements obligataires, ces derniers n’ont que légèrement dépassé leurs niveaux de fin 2015. Depuis le début de l’année, le rendement à 2 ans progresse de 18 points de base (à 1,25%), et celui à 10 ans a gagné 30 points de base (à 2,59%). Malgré le rebond des rendements obligataires, le marché n’anticipe pas d’emballement de l’inflation.

Les anticipations d’inflation intégrées par le marché sont modérées. Le graphique ci-après illustre les anticipations de rendements pour les obligations souveraines et les obligations indexées sur l’inflation (TIPS). Malgré l’espoir du marché d’une accélération de la croissance économique américaine l’an prochain, grâce à la politique budgétaire de l’administration Trump, les mesures au cours des 5 prochaines années des obligations d’Etat et indexées sur l’inflation sont très modérées, autour de la cible d’inflation de la Fed (2%).

Dans ce contexte, être exposé au marché obligataire ne semble pas aussi téméraire qu’il n’y paraît. La correction récente des marchés obligataires a fait baisser les prix dans de nombreux secteurs. Ce n’est pas le cas pour le haut rendement ou les prêts, mais d’autres compartiments ont souffert.

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Source: Morningstar

Quelques éléments de prudence. Les taux forward n’ont pas un grand pouvoir prédictif. Sur de courts horizons, ils peuvent avoir une utilité. A plus long terme, les estimations du marché ont souvent fait preuve d’excès. Toutefois, ces anticipations de taux donnent une idée des attentes du marché.

Il faut aussi noter une différence entre le fait qu’un actif ait vu son cours baisser et le fait qu’il est bon marché. Certaines classes d’actifs, comme les obligations adossées à des prêts subventionnés par les agences ont, par exemple, perdu 1,75% depuis que le rendement à 10 ans des bons du Trésor a rebondi, et leur rendement s’est écarté, en moyenne, à 2,9% contre 2%. Toutefois, leur spread s’est réduit des deux tiers. En d’autres termes, ce compartiment a perdu en valeur et son rendement a progressé, mais lorsque l’on tient compte des effets liés aux options, la classe d’actifs est moins attrayante qu’il y a quelques mois. Ceci devrait conduire les investisseurs à une certaine prudence, même si le risque de krach obligataire n’est pas encore d’actualité.

 

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A propos de l'auteur

Eric Jacobson  Eric Jacobson is Morningstar's director of fixed-income research and an editorial director for mutual fund content.