Amérique Latine : éviter une vision monolithique

Actions ou obligations, effet devise ou valeur intrinsèque, valeurs de croissance ou commodités… Gérant du fonds West AM Latin America, Bill Rudman décrypte les ambiguïtés d’une région en croissance.

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Quelles sont les perspectives à court terme sur l’Amérique Latine ?

Nous sommes très confiants sur cette région, les perspectives sont bonnes tant en terme de valorisation boursière qu’au niveau macro-économique. L’économie mondiale est en phase de reprise, cela est particulièrement sensible sur les marchés asiatiques.

Par rapport à cette région du monde, l’Amérique Latine connaît toujours 6 à 9 mois de décalage. Nous pensons que les marchés Latino-américains vont repartir de l’avant à court terme.

Entre septembre et le mois de mars, les marchés asiatiques ont affiché des performances substantielles, pour l’heure les marchés d’Amérique Latine ont connu des performances moins impressionnantes.

Comment s’explique ce décalage ?

La différence de vitesse en phase de reprise s’explique sans doute par les industries qui sont motrices de part et d’autre dans ces régions. Les marchés asiatiques doivent beaucoup aux industries high-tech alors que les marchés d’Amérique Latine sont plus sur des commodities.

Il faut veiller toutefois à ne pas faire de généralisations hâtives. L’Amérique Latine est une région très hétérogène.

Quels sont actuellement les pôles d’attraction sur cette région ?

Actuellement, nous sommes surtout investis sur le Mexique et le Brésil. Ce dernier pays dispose d’un bon environnement. Il y a effectivement la pression liée aux élections d’octobre prochain, mais les fondamentaux sont bons. Sachant toutefois que ce pays est sujet à des crises liées à sa croissance rapide. En ce sens, le Brésil est typiquement représentatif de l’Amérique Latine avec une forte fluctuation sur les capitaux.

Le Mexique a su éviter cette situation et apparaît aujourd’hui bien placé pour profiter de la reprise américaine. En ce qui concerne l’Argentine, nous en sommes absents actuellement, ce pays est touché par les mêmes travers que le Brésil.

Il y a aussi d’autres marchés comme le Pérou, le Chili ou la Colombie. Ces pays font partie de notre zone d’intervention, on regarde ce qui s’y passe et par le passé nous y avons été très présents. Mais il est parfois difficile de trouver des valeurs à acheter sur ces marchés qui sont somme toute petits. A titre d’illustration, il faut savoir que les échanges moyens sur les marchés péruviens s’élèvent à 2 millions de dollars.

Vous êtes exclusivement investis en actions, vous ne croyez aux marchés obligataires Latino-américains ?

Pas du tout, il y a 2 ans notre portefeuille comportait une poche obligataire substantielle. Les obligations peuvent représenter un bon moyen de jouer un secteur, une valeur ou pays lorsque l’offre en actions n’apparaît pas suffisante.

Quels sont les secteurs que vous privilégiez ?

Nous sommes très positifs sur la banque et le secteur des services financiers. Au Mexique, il s’agit d’un secteur en plein essor qui profitera de la reprise économique. Au Brésil, les valeurs boursières profitent d’une conjoncture positive compte tenu de la dette publique qui se recycle auprès des investisseurs individuels. Au Chili, on peut profiter du mouvement de concentration dans le secteur.

Nous sommes aussi exposés au secteur pétrolier et à l’industrie des télécommunications.

Alors que les investisseurs se montrent de plus en plus réservés sur les valeurs télécoms, est-ce que le manque de transparence des entreprises latino-américaines n’est pas particulièrement sensible dans ce secteur ?

Il est de bon ton de dire que les entreprises des marchés émergents, dont d’Amérique Latine, manquent de transparence. Les choses ne sont pas aussi tranchées et elles évoluent très vite.

Je viens du Royaume Uni et quand j’ai commencé à travailler sur l’Amérique Latine cela a véritablement été un choc. Mais le Corporate Governance n’est pas aussi absent que certains se plaisent à le dire.

Si vous prenez le cas du Brésil par exemple, vous y trouvez le Novo Mercado qui ne cote qu’un seul type d’action et qui a édicté des règles très claires en matière d’information. Certains continuent à garder une vision monolithique des marchés latino-américains. Si on prend le cas de l’Argentine par exemple, la difficulté n’est pas d’y trouver des valeurs sur lesquelles investir, mais bien dans la devise qui empêche de profiter de toutes ces opportunités.

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A propos de l'auteur

Frédéric Lorenzini

Frédéric Lorenzini  est Directeur de la Recherche de Morningstar France.