L'IA bouscule les habitudes des dirigeants d'entreprise

Tout le monde parle de l'intelligence artificielle (IA), mais comment les patrons perçoivent-ils cette évolution ?

Agefi/Dow Jones 06.02.2024
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IA

PARIS (Agefi-Dow Jones)--Tout le monde parle de l'intelligence artificielle (IA), mais comment les patrons perçoivent-ils cette évolution ? 70% des dirigeants considèrent que l'IA créera des changements majeurs au sein de l'organisation de l'entreprise au cours des cinq prochaines années, selon une étude réalisée auprès de 100 dirigeants dans le monde par le cabinet de conseil en stratégie Kearney et par le groupe de recrutement de dirigeants Egon Zehnder.

En revanche, seulement 43% pensent que leur rôle de dirigeant sera remis en cause. Signe que les patrons sont prêts à s'adapter à ce changement. Comment alors aborder cette transition ? Une nécessité, le dirigeant doit comprendre l'IA. "Les transformations liées aux technologies, et notamment aux data et à l'IA sont de plus en plus portées par la direction générale", se félicite Reda Gomery, associé chez Kearney. "Les dirigeants voient dans l'IA une opportunité pour transformer leur organisation et même leur rôle de patron. Même si la mise en ouvre peut être longue et parsemée d'embûches, ils voient le potentiel de l'IA", poursuit-il.

Ensuite, la direction générale doit accompagner ce changement et allouer les ressources nécessaires en temps, en argent et en personnel. Pour beaucoup d'entreprises, "le premier défi s'exprime en termes de capacités et de moyens pour y arriver, notamment en matière de données, le carburant de l'IA", poursuit Reda Gomery. "Se posent aussi des questions en termes de conformité, d'éthique, d'usage des données personnelles, etc., sans compter les sujets RH avec l'acquisition de compétences nouvelles et de talents", indique l'expert. Or, pour le moment, seuls 20% des dirigeants reconnaissent que leur entreprise est prête à faire face aux transformations liées à l'IA. Les trois quarts des patrons justifient cette incertitude par leur manque de préparation, dû aux manques d'expertises, de budget et de temps.

L'IA est largement perçue comme source d'opportunités

En dépit des difficultés de mise en ouvre, la plupart (85%) des sondés voient dans l'IA une opportunité à saisir et non un risque. Les dirigeants estiment qu'elle permettra d'améliorer les capacités de leur organisation et de gagner en compétitivité. Aussi, un dirigeant sur deux reconnaît que c'est lui qui doit prendre le sujet en main. Ce qui nécessite d'élaborer une stratégie. Elle s'accompagne d'investissements dans les infrastructures, les partenariats externes et le recrutement d'experts. Pour ces patrons interrogés, l'IA "leur donnera un meilleur accès à la connaissance de l'entreprise et de ses marchés, permettant d'étayer leur prise de décision, d'améliorer la gestion des risques et de créer des produits et services innovants", poursuit Reda Gomery.

L'étude détecte cinq facteurs clés de succès : évaluer en amont le potentiel de création de valeur grâce à l'IA, garantir l'intégrité des données qui alimentent l'IA, sécuriser les données, adopter un cadre technique souple adapté aux évolutions futures, et développer une stratégie de gestion du changement au sein de l'entreprise. "L'IA ne va pas nécessairement supprimer des emplois", tempère Delphine Bourrilly, présidente et associée-gérante de Kearney France. "Le défi consiste à recruter des talents pour développer l'IA en interne. Tous les collaborateurs devront aussi apprendre à travailler différemment avec l'implémentation de l'IA dans les différents process de l'entreprise", ajoute-t-elle.

Tenir le défi des coûts et de la fiabilité des données

Selon les auteurs de l'étude, les dirigeants doivent surveiller quatre risques principaux liés à l'IA. Primo, la fiabilité des données. L'IA générative peut produire des résultats erronés. La présence humaine est donc nécessaire en permanence pour vérifier les résultats. Secundo, les coûts - de collecte, de stockage et de traitement de l'information - explosent et nécessitent d'être gérés au plus serré.

Tertio, l'appel à des services tiers pour le traitement de données sensibles est source de risque supplémentaire. Kearney invite les entreprises à vérifier la fiabilité et la sécurité de leurs services tiers et à encadrer clairement les rôles et responsabilité de chacun, notamment en matière de protection des données.

Quarto, relativiser les résultats de l'IA. Si les données de départ ne sont pas exhaustives, les résultats fournis par l'IA risquent d'être biaisés. Aujourd'hui, "les données sont dispersées dans les grandes organisations", constate Reda Gomery. "Comme IA et data vont de pair, cela constitue encore une vraie barrière au déploiement de l'IA à l'échelle industrielle. Sans compter les questions de coûts, que veulent maîtriser les entreprises, et le manque de compétences sur le marché", indique-t-il.

Beaucoup d'entreprises françaises testent l'IA sur des cas d'usage

En France, "les grandes entreprises ont pris le sujet à bras-le-corps et défini des cas d'usage", relève Reda Gomery. "Les dirigeants sont de plus en plus sensibilisés. Le secteur des biens de consommation est le premier à l'ouvre. Cela devrait se traduire par des réalisations concrètes prochainement. Le secteur de la finance devrait suivre", estime-t-il.

Commencer avec de petits projets assortis de résultats probants est le gage d'une transformation rapide et durable. Souvent, les entreprises "définissent des cas d'usage pour tester l'IA, par exemple pour la gestion des talents et le recrutement, ou encore pour gérer les contrats", constate Reda Gomery. "Beaucoup d'entreprises françaises sont à un stade expérimental. Elles attendent d'en mesurer les effets avant de s'orienter vers un déploiement plus large."

A ce stade, "l'usage de l'IA reste expérimental et n'intervient pas encore dans la définition de la stratégie de l'entreprise", précise Delphine Bourrilly. "L'IA va changer nombre de processus, voire le cour de métier de certaines entreprises, mais nous ne savons pas encore exactement de quelle manière. Les changements pourraient être drastiques, comme par exemple pour les secteurs technologiques et de services (conseil, marketing...)", conclut-elle.

-Bruno de Roulhac, L'Agefi ed: VLV

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