Quand la BCE baissera-t-elle ses taux ?

L’institution de Francfort, tout comme la Banque d’Angleterre, sont sous pression pour agir.

Antje Schiffler 13.12.2023
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Il est fort probable que la Banque centrale européenne (BCE) maintiendra ses taux directeurs inchangés jeudi au terme de la réunion du conseil des gouverneurs, mais les observateurs du marché attendront des indications sur le moment où l’institution adoptera une position plus accommodante, vraisemblablement au cours du premier semestre 2024.

Les marchés des swaps intègrent une forte probabilité d'une première baisse de 25 points de base d'ici mars et l'euro est sous pression par rapport au dollar américain face à ces attentes, tout comme les rendements obligataires européens.

Quand la BCE va-t-elle baisser ses taux ?

François Villeroy de Galhau, membre du Conseil, a souligné dans une récente interview accordée au journal La Dépêche du Midi que la banque avait fini d'augmenter les taux et qu'elle allait envisagez des réductions à un moment donné en 2024, à moins qu'il n'y ait des « surprises majeures ».

« Nous nous attendons à ce que la BCE ne parvienne pas à fournir des indications sur le calendrier de la première baisse des taux directeurs au-delà d'un avenir proche, tout en réitérant son appel en faveur d'une approche dépendante des données. Cela laissera une baisse des taux au deuxième trimestre 2024 comme le scénario le plus probable », notent les économistes de Danske Bank dans une note datée du 8 décembre.

Une enquête menée par Reuters auprès de 90 économistes a montré que la majorité s'attend à des baisses de taux avant la réunion de juillet de la BCE. Lors d'un précédent sondage réalisé en novembre, une majorité de 55 % estimaient que les taux resteraient inchangés au moins jusqu'à la mi-2024.

Beaucoup de choses ont changé ces dernières semaines, déclare Michael Field, stratégiste du marché européen de Morningstar.

« L'inflation en Europe était plus élevée qu'aux Etats-Unis, mais avec un rythme revenu à 2,4% en novembre, nous ne sommes plus si loin du niveau visé par la BCE », estime-t-il.

Isabel Schnabel, membre du directoire de la BCE, a qualifié les chiffres de l'inflation d'"agréable surprise", mais a également mis en garde contre une déclaration trop précoce de la victoire contre l'inflation.

« Nous continuons de nous attendre à une légère hausse au cours des prochains mois » a-t-elle déclaré dans une interview avec Reuters.

« Il va y avoir un renversement de certaines mesures fiscales et de certains effets de base, et nous ne pouvons pas exclure qu'il y ait une nouvelle flambée des prix de l'énergie ou de l'alimentation. »

« Il existe toujours un risque de hausse de l'inflation », note Field. « Les prix de l'énergie ont le potentiel de grimper en flèche au cours de l'hiver et les marchés du travail restent tendus dans tous les domaines, ce qui augmente le potentiel de nouvelles augmentations de salaires au cours de l'année prochaine, et pourrait faire grimper l'inflation. »

Trop restrictif ?

L’action de la BCE est-elle trop restrictive ? La question a le mérite d’être posée dans une zone euro dont l'économie s'est contractée au troisième trimestre. Il semble désormais qu’il en sera de même au cours des trois derniers mois de 2023, ce qui conduirait techniquement la zone euro en récession.

L'Allemagne, première économie européenne, est déjà en récession technique. Le PIB réel s'est contracté de 0,1 % au troisième trimestre 2023, en raison du ralentissement de la demande des consommateurs et de la demande extérieure.

Le resserrement budgétaire consécutif à un arrêt de la Cour constitutionnelle pèsera probablement également sur la demande intérieure : le 15 novembre 2023, cette dernière a statué que l'utilisation des autorisations d'emprunt par des fonds opérant en dehors du budget de base du gouvernement central doit être reflétée dans le calcul de l’endettement.

Cela a généré un « trou » profond dans la planification budgétaire pour 2024 et aura de graves implications sur les dépenses budgétaires du pays – et sur la croissance du PIB. Deutsche Bank a depuis abaissé ses prévisions de croissance du pays pour l'année prochaine d'environ 0,5%, à -0,2%, à la suite de cette décision.

Pour l’heure, les responsables de la BCE se montrent prudent dans la manière de décrire la situation actuelle.

Morgan Stanley estime que le langage de retenue ainsi que la dépendance aux données se maintiendront un certain temps.

« Nous prévoyons une première réduction en juin 2024, à condition que les données salariales montrent une certaine modération », indique la banque dans une note récente aux investisseurs.

 

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A propos de l'auteur

Antje Schiffler  est rédactrice en chef de Morningstar Allemagne.