BNP Paribas fait pivoter son modèle pour encourager la transition climat

La pression s’accumule sur la première banque française.

Agefi/Dow Jones 01.12.2023
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BNP

PARIS (Agefi-Dow Jones)--Des rapports d'ONG qui s'accumulent année après année, des poursuites judiciaires, en France, au nom du devoir de vigilance,une lettre ouverte d'étudiants d'école de commerce refusant de travailler pour la banque au motif qu'elle finance toujours la production d'énergies fossiles...

Depuis quelques années, les critiques s'accumulent contre BNP Paribas.

Que reproche-t-on à la première banque européenne ? Sans doute de ne pas aller assez vite pour encourager ses clients dans la transition vers une économie bas carbone.

"Il existe un décalage de plus en plus important entre certains rapports des ONG, incorporant parfois des données anciennes, et la réalité de la transformation de nos activités", explique à L'Agefi Antoine Sire, directeur de l'engagement d'entreprise de BNP Paribas. "Concrètement, nous changeons notre business model du financement de l'énergie, qui, comme l'économie elle-même, dépendait des énergies fossiles", ajoute-t-il. D'ailleurs, l'énergie représente seulement 3% à 4% de l'activité de financement de la banque aujourd'hui.

Sortie du charbon thermique et métallurgique

Sur les 50 milliards d'euros consacrés au secteur de l'énergie, le bas carbone représente 60% aujourd'hui et BNP Paribas ambitionne de faire passer cette part à 80% à horizon 2030. Le mouvement a d'abord été enclenché avec l'arrêt en 2017 du financement des hydrocarbures non conventionnels (gaz et pétrole de schiste, pétrole issu des sables bitumineux).

La banque française a également pris l'engagement d'arrêter de financer l'extraction de charbon thermique et de sortir complètement de la filière en 2030 dans les pays de l'OCDE et en 2040 dans le reste du monde.

Un engagement complété il y a quelques jours par l'arrêt du financement de l'extraction de charbon métallurgique. Une mesure qui a même été saluée par l'ONG Reclaim Finance, BNP Paribas figurant parmi les seules cinq banques internationales à sortir de cette filière.

Réduction du pétrole et du gaz

La banque française a poursuivi dans cette voie au printemps dernier en prenant l'engagement de réduire de 5 à 1 milliard d'euros le financement de l'extraction/production de pétrole d'ici à 2030.

Les financements concernant le gaz devraient être réduits de 30% sur la même période. Et ce n'est pas seulement de l'affichage : "Nous atteindrons probablement cet objectif avant, probablement en 20263, estime Antoine Sire. Et de rappeler que BNP Paribas n'a pas réalisé d'émission obligataire pour un pétrolier depuis sa dernière opération pour BP, ce qui la classe au 34e rang mondial sur ces financements, bien loin derrière les banques américaines.

Quant au crédit corporate, "les ONG veulent que nous cessions immédiatement toute relation commerciale avec l'ensemble des énergéticiens. Mais certains de ces acteurs sont eux aussi engagés dans la transition. Leurs cash-flows sont suffisants pour distribuer les dividendes et payer leur dette. Nous devons être en mesure de répondre à leur demande, que nous espérons croissante, de financement de projets renouvelables", explique Yannick Jung, responsable de l'activité global banking chez BNP CIB.

Pour réduire son exposition aux énergies fossiles, la banque de financement et d'investissement n'a pas hésité à fermer des équipes entières, notamment dans les activités de "reserve based lending", un mode de financement des activités pétrolières et gazières assis sur la projection des cash-flows futurs générés par ces actifs.

"Ces équipes ont été redéployées vers des activités de financement bas carbone. Les actifs reserve based lending sont en train d'être amortis ou ont été cédés", précise Yannick Jung.

Des opportunités dans les énergies propres

Parallèlement à cela, la banque accompagne les besoins de financement dans le domaine des énergies vertes, électricité, bio fioul, ou hydrogène, estimés entre 4.000 et 5.000 milliards de dollars.

"C'est une véritable révolution industrielle. Nous y avons vu des opportunités et avons mis en place il y a quelques années des équipes expertes dédiées qui couvrent toutes les géographies", souligne Yannick Jung. BNP Paribas continue donc de conforter sa place sur ce marché.

La banque est leader mondial en matière d'obligations vertes et se classe au premier rang des volumes d'émissions sur les marchés de capitaux en Europe, Moyen-Orient, Afrique pour les entreprises bas carbone depuis 2020.

La banque de financement et d'investissement est accompagnée dans cette tâche par le "low carbon transition group". Ce comité transversal aide les clients industriels dans leur trajectoire de décarbonation.

Le questionnaire KYC (know your customer) permet par ailleurs à la banque de noter ses contreparties selon cinq critères: climat, biodiversité, droits humains, éthique des affaires et impact sur les communautés locales. La démarche est étendue aux 1.100 entreprises qui composent le fonds de commerce de BNP Paribas au plan mondial.

Le coût de la transition

La réduction de l'exposition aux énergies fossiles n'est donc pas neutre économiquement pour la banque.

"Nous perdons du produit net bancaire à court terme en excluant certains clients. Nous échangeons des actifs très peu risqués sur des technologies matures avec des marges importantes, contre des actifs basés sur des technologies émergentes avec des marges plus serrées.

Mais nous construisons notre capacité à continuer à financer l'économie demain", explique Yannick Jung. La banque a un savoir-faire dans le financement de nouvelles technologies: elle a déjà accompagné le déploiement des réseaux GSM, du réseau câblé et de la fibre.

Le rééquilibrage du modèle devrait, par ailleurs, lui permettre d'éviter une charge supplémentaire en termes de capital, le superviseur considérant les énergies fossiles comme des activités très risquées à long terme.

"Nous avons la conviction qu'il y aura, d'ici quelques années, des acteurs dans ce secteur pour lesquels il sera très difficile de se financer", avance Yannick Jung.

 -Aurélie Abadie, L'Agefi ed : LBO

 Agefi-Dow Jones The financial newswire

(END) Dow Jones Newswires

 

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A propos de l'auteur

Agefi/Dow Jones  est une agence de presse financière basée à Paris.