Virbac, Bic : des divergences extrêmes

La quête de valeurs de qualité et de croissance pousse les investisseurs à ne plus faire attention au prix payé.

Jocelyn Jovène 15.10.2019
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L’actualité financière fait parfois bien les choses. Vendredi dernier, Bic et Virbac ont respectivement abaissé et relevé leurs prévisions financières. Lundi 14 octobre, Virbac a bondi de 11% en Bourse (avec un plus haut de séance à +15%), tandis que Bic cédait 3% (après avoir perdu un peu plus de 6% en début de séance).

Depuis le début de l’année, le fabricants de produits de santé animale a vu sa capitalisation boursière doubler (+103%), tandis que le spécialiste des articles de papeterie, les briquets et les rasoirs l’a vu fondre de 29%.

Le plus « surprenant », c’est la manière dont cela se traduit en termes de multiples de valorisation. Les deux graphiques suivants, fournis par Factset, illustrent l’évolution du multiple de résultat d’exploitation des deux sociétés depuis 2004, ainsi que la moyenne et une mesure de dispersion (écart-type).

Historique du multiple de résultat d’exploitaiton de Virbac et Bic

Virbac EVEBIT 12 m Fwd history Factset 20191015

BIC EVEBIT 12 m Fwd history Factset 20191015

Source : Factset

A 23,6x, Virbac se traite avec une prime de 61% par rapport à sa moyenne historique. A 8,6x, Bic se traite avec une décote de 16% - un niveau presque digne d’intérêt pour un fonds de private equity (sachant que le titre était tombé à 7,6x son résultat d’exploitation en août dernier).

Bien évidemment, il y a des raisons fondamentales à ces écarts de performance. Depuis plusieurs années, Bic rencontre des difficultés structurelles dans ses trois grands marchés, liées aux changements de comportement des consommateurs – obligeant le groupe à redoubler d’efforts en matière d’innovation produit et à soutenir sa marque par des investissements publi-promotionnels – ce qui pèse sur ses marges et l’oblige à se montrer plus prudent.

A l’inverse, Virbac, qui avait connu quelques années difficiles, en particulier aux Etats-Unis, connaît depuis trois trimestres plus de 5% de croissance organique chaque trimestre (8,4% au cours du troisième trimestre), ce qui lui fait retrouver les faveurs des investisseurs.

Les cas de Bic et Virbac illustrent un phénomène plus général sur les marchés actions. La quête de rendement et d’entreprises de croissance et de qualité pousse les investisseurs à ne plus faire attention au prix payé.

Toute entreprise confrontée à des problèmes de stratégie, de dynamique de croissance ou de mauvaise allocation du capital, et dont les résultats tardent à se redresser, est délaissée. Cela concerne même des secteurs « défensifs » comme la consommation courante.

A l’inverse, les investisseurs ne regardent plus le prix payé pour de belles franchises, des marques reconnues, bien implantées, et qui parviennent à soutenir des rythmes de croissance supérieurs au PIB mondial malgré les incertitudes. On trouve aussi ces noms dont la consommation courante (L’Oréal), le luxe (LVMH) ou la technologie (Dassault Systèmes), pour prendre des entreprises emblématiques de leur secteur d’activité.

La question naturellement est de savoir si l’on n’est pas arrivé à une situation extrême et si elle peut durer. Il y a de fait fort à parier que dans un environnement de « fin de cycle » et de taux d’intérêt très très bas, cela ne soit le cas – mais gare aux déconvenues.

Les investisseurs semblent en effet oublier que la vie des entreprises est rarement un long fleuve tranquille. Aucune équipe de direction n’est à l’abri d’une erreur d’allocation du capital, d’une opération de croissance externe trop chèrement payée, ou pire d’une décision de « leverager » le bilan pour racheter ses actions en haut de cycle…

A l’inverse, des titres délaissés peuvent parfois faire oublier les efforts faits pour redresser la rentabilité, se focaliser sur l’innovation et la croissance sur le long terme. Le temps des entreprises n’est pas toujours celui de la Bourse, et pourtant c’est bien le premier qui est le plus important.

 

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A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est le rédacteur en chef de Morningstar France.