Diversité des indices : trop de choix nuit à la qualité

Le monde des indices et des ETP est caractérisé par une foisonnante diversité. Mais cela a-t-il conduit à une extension de l’horizon d’investissement ? Nous analysons les préférences des investisseurs en Europe.

Ali Masarwah 24.01.2019
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Selon l’Association de l’industrie des indices (IIA), on dénombrait fin juin 2018 pas moins de 3,7 millions d’indices, en augmentation de 440.000 par rapport à l’année précédente. Si tous ces indices ne sont pas convertis en instruments financiers investissables, un tel nombre donne néanmoins le tournis. L’industrie des fournisseurs d’indices est passée du stade artisanal à la production de masse.

Une telle croissance est-elle pertinente et rend-elle in fine service aux investisseurs ? Comment la diversité des indices a-t-elle évolué ces dernières années ?

Pour répondre à ces questions, nous avons analysé le marché européen des ETP à travers le type d’indice et de catégories de fonds qui ont attiré le plus de capitaux et comment ces produits ont vu leur collecte évoluer depuis 2009.

Nous avons aussi regardé quelle a été l’évolution des indices à bêta stratégique, appellation que chez Morningstar nous profitons à celle un peu trop commerciale de « smart bêta ».

En Europe, environ 680 milliards d’euros sont investis de manière passive à travers des ETP, dont 230 milliards d’euros (34%) dans 10 ETF répliquant des indices de marché. Neuf de ces dix instruments portent sur des marchés actions, un sur l’or.

Sans surprise, l’indice S&P 500 est le plus populaire auprès des investisseurs . 75 milliards de dollars (11% des actifs sous gestion fin 2018) étaient traités à travers 18 ETF répliquant cet indice. Suit l’indice Euro Stoxx 50, avec 23 milliards d’euros à travers 12 ETF. Environ 29 miliards d’euros étaient investis dans des stratégies liées à l’indice MSCI World.

La concentration des actifs a-t-elle augmenté par rapport à 2009 ? Il y a dix ans, la photographie des ETF les plus populaires était bien différente. L’indice Euro Stoxx 50 était alors le plus populaire en Europe avec 18 milliards d’euros d’encours, soit environ 12% des actifs totaux. 44% des ETP étaient investis dans les 10 premiers ETF. L’or et le DAX faisaient également partie des classes d’actifs populaires mais dans de moindres proportions.

Au niveau des fonds, 16% des ETP en 2009 incluaient des indices qui suivent les actions de la zone euro, devant un ETP traquant l’or (10% des actifs).

Dans l’ensemble, la concentration des ETP a plutôt eu tendance à reculer en dix ans. Fin 2018, les 10 indices les plus populaires représentaient 55% des actifs sous gestion, 3 points de pourcentage de moins qu’en 2009. A l’époque, seuls 449 ETP étaient recensés selon les données de Morningstar, soit des actifs moyens de 346 millions d’euros par ETP à l’époque contre 382 millions d’euros pour 1.780 ETP fin 2018.

Qu’en est-il des ETF à bêta stratégique ? En 2009, ces instruments étaient réellement des produits exotiques. On n’en comptait que 32 avec un peu moins de 4 milliards d’actifs sous gestion (2,5% du marché européen des ETP).

Dix ans plus tard, les encours ont été multipliés par dix. On dénombre 332 trackers avec environ 51 milliards d’euros d’actifs sous gestion et 7,5% du marché des ETP en Europe, soit un investissement moyen de 150 millions d’euros (contre 124 millions d’euros dix ans plus tôt).

Cette brève revue montre que si la croissance du marché a été très significative ces dix dernières années, les investisseurs tendent toujours à privilégier des catégories globales ou générales et du bêta « pur ». La concentration du marché a reculé, mais pas autant que ne pourrait le suggérer la forte croissance du nombre d’instruments créés. Le constat est à peu près identique pour les ETF à « bêta stratégique ».

Cette croissance peut-elle se poursuivre ? Pour le savoir, encore faut-il se demander si les ETF et les ETF à « bêta stratégique » seront réellement en mesure de créer de la valeur pour les investisseurs sur le long terme, c’est-à-dire de surperformer sur une base ajustée du risque. Cela sera sans doute vrai dans de très rares cas. Comme on le sait bien, la surperformance est une denrée rare dans le monde de la gestion d’actifs, que l’on soit un gérant actif ou passif.

 

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A propos de l'auteur

Ali Masarwah

Ali Masarwah  était le rédacteur en chef de Morningstar Allemagne.