La balle dans le camp des banques centrales

Le regain de volatilité récent sur les marchés ne peut être ignoré par les banquiers centraux.

Jocelyn Jovène 27.08.2015
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Une fois encore, les marchés voient leur salut dans l’action des banques centrales. Et ces dernières semblent l’avoir bien compris. Alors que la Bourse chinoise continuait de s’effondrer en début de semaine, la Banque Populaire de Chine (PBOC) annonçait simultanément une baisse de son taux directeur et du niveau de réserve imposé aux banques commerciales chinoises, une action assez inédite.

Mercredi, William Dudley, président de la Réserve fédérale de New York, a déclaré qu’un resserrement des taux directeurs, initialement attendu en septembre, « semble moins urgent qu’il y a quelques semaines », tout en ajoutant que ce relèvement pourrait de nouveau apparaître d’actualité lorsque de nouvelles données auront été collectées d’ici à la prochaine réunion du comité de politique monétaire, prévue les 16 et 17 septembre prochain.

Les responsables des principales banques centrales doivent en outre se retrouve ce week-end à Jackson Hole pour réfléchir sur les perspectives d’inflation et sur la relation entre marché du travail et évolution des prix. A n’en pas douter, des déclarations en lien avec l’actualité devraient en émerger, car c’est bien le risque déflationniste qui est au cœur du regain de volatilité sur les marchés ces dernières semaines.

Un certain nombre de gérants attendent d’ailleurs des banques centrales, à commencer par la Fed, qu’elles prennent des mesures plus radicales pour enrayer tout risque déflationniste, revenu sur le devant de la scène après l’annonce surprise de la décision de la Chine de dévaluer sa devise sur fond de repli marqué du cours des matières premières.

Ray Dalio, patron de Bridgewater Associates, l’un des plus gros hedge funds au monde, estime dans une tribune du 25 août qu’il faut plutôt s’attendre à une nouvelle période d’assouplissement quantitatif de la part de la Fed avant de voir un début de resserrement de sa politique monétaire. « Il est maintenant évident que les risques d’une contraction déflationniste ont augmenté par rapport à ceux d’une expansion inflationniste », explique-t-il.

La résurgence des craintes déflationnistes a été rapide. Il y a quelques semaines seulement, après l’épisode grec, les marchés tablaient tranquillement sur une remontée des taux directeurs de la Fed dès septembre, avec l’espoir d’un raffermissement de la croissance américaine au cours du second semestre.

La complication de la situation économique en Chine et l’impression donnée par les autorités chinoises d’une moindre capacité à contrôler la situation ont renversé ces anticipations.

Le fait que les marchés obligataires mondiaux aient fait preuve d’une relative inertie, poussant les banquiers centraux à multiplier les déclarations, constituerait un signe avant-coureur d’annonces plus importantes dans les semaines à venir. « Derrière l’inertie des taux longs à la crise en présence pourraient se cacher les prémices d’une remontée du risque souverain », estime Véronique Riches-Flores de RF Research. L’économiste y voit un « avertissement » bien entendu par les banquiers centraux, ouvrant la porte à de nouvelles mesures d’assouplissement quantitatif.

Cela ne l’incite toutefois pas à se réjouir de l’annonce d’un nouveau QE aux Etats-Unis ou de l‘extension de celui engagé depuis mars par la BCE. « Trop de QE tue le QE » avertit la présidente de RF Research, les banquiers centraux prenant en effet un risque de décrédibiliser leur politique et leur parole, ce qui constituerait un signal inquiétant à terme pour les marchés.

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A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.