Pourquoi la volatilité est-elle si faible?

Les facteurs macro-économiques contribuent largement à la faiblesse de la volatilité actuellement.

Jocelyn Jovène 03.06.2014
Facebook Twitter LinkedIn

Les indicateurs de volatilité sur plusieurs classes d’actifs (actions, devises, taux) sont à des plus bas historiques. Si cette situation peut s’expliquer par des facteurs macro-économiques, une faible volatilité est également l’indicateur d’une faible aversion au risque… avec un risque de déconvenue pour les investisseurs qui prendraient trop de risques.

Explications macro-économiques

« Des régimes plus persistants sont liés aux conditions économiques sous-jacentes et aux effets des politiques monétaires et du crédit », observe Jonathan Lowe chez J.P.Morgan Asset Management.

Selon cet expert, parmi les facteurs importants à considérer, figurent :

  • le degré de maturité du cycle économique (la volatilité augmente lorsque des tensions sur les capacités de production ou sur le marché de l’emploi apparaissent) ;
  • le niveau d’incertitude macro-économique (qu’illustre le niveau de dispersion des prévisions économiques) ;
  • les tensions sur les marchés financiers (toute crise se traduit par une aversion au risque, et donc par une volatilité accrue) ;
  • la crédibilité de la politique monétaire : « les politiques non conventionnelles et les limites du plancher à taux zéro ont clairement contribué à réduire la volatilité des taux d’intérêt à l’extrémité courte de la courbe depuis que les taux directeurs ont été ramenés à zéro », note Jonathan Lowe.

Signaux contradictoires

Les marchés financiers envoient depuis quelques temps des signaux contradictoires. Sur les marchés de taux, la baisse des rendements obligataires signale plutôt la crainte d’une croissance molle et d’une inflation faible (voire une menace de déflation, bien identifié par la BCE). Le rendement à 10 ans du Bund allemand est actuellement à 1,37% (l’OAT 10 ans à 1,77% et le 10 ans américain à 2,53%), soit un des plus bas niveaux atteints depuis l’an dernier.

Les marchés d’actions, qui atteignent des plus hauts, semblent eux portés par cette confiance que quoi qu’il arrive les banques centrales seront prêtes à agir en injectant de nouvelles liquidités. Depuis 2010-2011 et la multiplication des menaces sur la croissance économique ou l’intégrité du système bancaire, les banques centrales ont utilisé l’arme de la création monétaire pour rassurer les investisseurs, avec un certain succès.

Le problème est que les fondamentaux des entreprises, en particulier en Europe, donnent l’impression de tarder à repartir de l’avant. Dans une note récente, Bank of America Merrill Lynch observait que le mouvement de révision en baisse des prévisions de résultats des entreprises en Europe atteint une longueur de longévité (54 mois consécutifs) depuis 1994.

Malgré cela, les actions se maintiennent sur des niveaux particulièrement élevés, ce qui peut être une source de risque non négligeable pour les investisseurs de long terme.

« Des cours au plus haut et des rendements obligataires au plus bas peuvent être confortés par des taux directeurs proche de zéro, mais ils n’offrent aucune protection contre les chutes de cours et le risque de perte », observent les analystes quantitatifs de Société Générale dans une note.

Régimes de faible volatilité

Le fait est que les régimes de faible volatilité ne durent jamais éternellement, contrairement à ce que certains investisseurs ont pu croire en 2005-2007 ou aujourd’hui.

Il arrivera toujours un moment où, pour une raison ou une autre, les indicateurs de volatilité remonteront.

Parmi les facteurs de risques à suivre de près, Jonathan Lowe chez J.P.Morgan Asset Management cite des erreurs de prévision sur l’état d’avancement du cycle économique, ainsi qu’une erreur de politique monétaire de la part des banques centrales.

Les économistes de Goldman Sachs pointent dans une étude datée du 14 mai pointent d’autres facteurs purement macro-économiques, comme une diminution moins rapide que prévu du taux de chômage américain ou un risque d’inflation qui surgirait plus vite que prévu et conduirait la Fed a remonter ses taux plus tôt qu’attendu par le marché.

L’autre élément est la prévisibilité de la politique monétaire. « L’an dernier, la réaction vive à l’annonce du ‘tapering’ avait conduit à un bon de la volatilité, même s’il n’a été que temporaire. Mais il y a un risque que la volatilité reparte si des surprises positives au niveau des statistiques économiques apparaissent », observe Goldman Sachs.

Pour aller plus loin

Les régimes de volatilité de différentes classes d’actifs dans l’histoire (actions, obligations, devises), selon Goldman Sachs.

Source: Goldman Sachs

 

Facebook Twitter LinkedIn

A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.