Ces très chers fonds.

Les différents frais supportés par un OPCVM sont une composante intégrale de ses chances de succès à long terme.

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Alors que le débat sur le pouvoir prédictif des performances passées sur les performances futures semble sans fin, il est un critère quantitatif qui à notre avis mériterait beaucoup plus d’attention au moment de sélectionner un fonds d’investissement : l’ensemble des frais supportés par ce dernier. Toutes choses égales par ailleurs, un fonds aura d’autant plus de chances de surperformer qu’il sera offert à un meilleur prix que ses concurrents. La logique est simple, quelque soit la performance passée, les frais prélevés sur un OPCVM continueront à grignoter la performance future. De plus, contrairement à la performance, plus ou moins volatile dans le temps, on note une assez grande stabilité des différents frais supportés par les OPCVM. Malheureusement, ceux-ci sont multiples, pas toujours visibles et extrêmement variables d’un fonds à l’autre.

Droits d’entrée, éventuellement de sortie, et frais de gestion fixes maximum figurent généralement sur les fiches commerciales individuelles des fonds. Dans un grand nombre de cas, ces frais sont malheureusement bien loin de représenter l’ensemble des sommes prélevées sur les valeurs liquidatives. L’investisseur doit donc impérativement consulter la partie B dite « statistique » du prospectus pour connaître le total facturé à l’OPCVM et regarder plus particulièrement, les « autres frais ». Ceux-ci sont éventuellement composés d’une commission de surperformance. Si elle est structurée de manière adéquate, c'est-à-dire d’un montant raisonnable et par rapport à un benchmark approprié, une éventuelle commission de surperformance nous semble une assez bonne façon d’aligner les intérêts du gérant avec ceux des porteurs de parts du fonds. En revanche, exception culturelle oblige, les sociétés de gestion françaises ont également la possibilité, pas l’obligation, de prélever des commissions de mouvement. Celles-ci sont forfaitaires ou en pourcentage du montant de chaque transaction effectuée sur le portefeuille. Il ne s’agit pas des frais de transaction payés aux courtiers mais de commissions perçues par le dépositaire des fonds ou la société de gestion elle-même.

Cette pratique nous semble aller totalement à l’encontre des intérêts des investisseurs : imaginons, sans difficulté, une société de gestion, qui à l’issue d’une campagne marketing efficace, parvient à réaliser une collecte importante. Ceci génère des transactions, donc des commissions, qui vont être supportées par l’ensemble des porteurs de parts du fonds. Les investisseurs de long terme, présents dans le fonds depuis longtemps, sont donc injustement pénalisés par ces commissions de mouvement. Celles-ci peuvent être facturées plus de 0.5% du montant de chaque transaction, et en fonction de l’activité du portefeuille, représenter plus de la moitié du total des frais facturés à l’OPCVM. Cette pratique est par ailleurs potentiellement porteuse de conflits d’intérêts. Imaginons, en espérant cette fois-ci qu’il s’agisse vraiment de cas exceptionnels, un gérant dont la rémunération, basée sur la profitabilité de la société de gestion pour laquelle il travaille plutôt que sur la performance du fonds qu’il gère. Plus le nombre de transactions sera élevé, plus les commissions de mouvement seront élevées, et plus son bonus sera élevé. C’est flagrant lorsque les commissions de mouvement sont directement perçues par la société de gestion. Un peu moins, lorsqu’elles sont perçues par le dépositaire quoique l’on note que le dépositaire des fonds n’est bien souvent que la maison mère de la société de gestion qui gère les fonds.

Quoiqu’extrêmement regrettables, ces pratiques sont néanmoins bien instructives. Au moment de sélectionner ses OPCVM, l’investisseur doit non seulement surveiller l’ensemble des frais prélevés mais également s’intéresser aux pratiques suivies par le promoteur : le considère-t-il comme un partenaire de long terme ou un moyen d’accroître sa profitabilité à court terme ?


Thomas Lancereau est Directeur de l’Analyse Fonds de Morningstar France. Il est joignable à l’adresse suivante : analystes@morningstar.fr

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A propos de l'auteur

Thomas Lancereau, CFA

Thomas Lancereau, CFA  Directeur de l'Analyse des Fonds, Morningstar France