Cinq actions à acheter, et cinq à éviter

Les valeurs que nous préférons au niveau mondial. Et les autres.

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Dans l’environnement actuel, trouver des idées d’investissement intéressantes n’est pas une mince affaire. Après la reprise notable des six derniers mois, sur la base de notre univers de 1.800 sociétés analysées au niveau mondial, nous considérons les actions comme étant correctement valorisées. Fin 2011, nous avions identifié trois éléments qui indiquaient que les marchés actions américains devaient connaître une reprise sensible en 2012 : une hausse de la demande en biens de consommation durables, des bilans d’entreprises sains accompagnés de bénéfices en hausse, et des multiples de cours sur bénéfices raisonnables.

Nous continuons à penser que le marché américain profitera des deux premiers points, mais après la stupéfiante reprise du premier trimestre, les valorisations ne sont plus aussi attrayantes qu’elles l’étaient. Non seulement l’ensemble des statistiques le confirment (avec notre univers de couverture s’échangeant à 92 % de sa Fair Value et la plupart des principaux indices mondiaux s’échangeant à des multiples de plus de 10), mais la structure de nos recommandations l’étaye également. Fin 2008, plus de 60 % de notre univers de couverture était composé de valeurs notées cinq étoiles. La situation actuelle a largement évolué et le nombre d’actions notées cinq étoiles est quasiment égal à celui des actions notées une étoile. Étant donné que le marché a moins de potentiel de hausse qu’il y a trois mois, nous ne serions pas surpris de constater davantage de volatilité d’ici la fin de l’année 2012, accompagnée de quelques opportunités d’achat supplémentaires pour les actions.

Avec seulement 62 sociétés se négociant à des niveaux de valorisation de cinq étoiles, les opportunités sont beaucoup plus rares qu’elles ne l’étaient il y a à peine trois mois. Ceci étant, nous en trouvons toujours, en particulier dans les secteurs plus sensibles à la conjoncture économique. Les secteurs des matériaux de base et de l’énergie s’échangent à 87 % de leur Fair Value, en dessous de tout autre secteur. À l’opposé, l’immobilier nous semble survalorisé de plus de 10 %, à 111 % de sa Fair Value. Rappelons que les plus fortes hausses du premier trimestre ont concerné les secteurs des technologies et des services financiers. En y regardant de plus près, il s’avère que les secteurs des matériaux de base et de l’énergie sont véritablement bon marché : les producteurs d’aluminium s’échangent en moyenne à 60 % de leur Fair Value, ceux exposés à l’acier à 63 % et les services et équipements pétroliers et gaziers à 75 %.

Toute chose étant égale par ailleurs, dans ce contexte, nous sommes bien plus enclins à investir dans les actions que dans les obligations. Les rendements sur les obligations privées ne peuvent quasiment plus baisser, et en fait, nous nous attendons à ce que le trend porteur de plusieurs années sur les obligations commence finalement à s'inverser cette année. Alors que l’économie américaine continue à se rétablir, nous estimons que les actions seront plus prometteuses que les obligations.

En Europe, les choses se sont améliorées, mais seulement pour un temps. La BCE est parvenue à éviter une crise de liquidité, mais les problèmes sous-jacents de solvabilité sont loin d’être résolus. La BCE a certainement gagné du temps et les marchés ont salué cette amélioration. Ceci dit, nous pensons toujours qu’il existe des opportunités d’investissement dans des sociétés européennes sous-valorisées telles que Novartis qui s’échange avec une décote de 20 % par rapport à sa Fair Value et qui a un large avantage compétitif. Pour les investisseurs un peu plus enclins au risque, ArcelorMittal, l’aciériste dont l’avantage compétitif est plus étroit, s’échange à juste 40 % de la Fair Value que nous lui attribuons.

En Australie, le contexte économique est différent. Tout Australien vous le dira, le pays est en pleine « économie à deux vitesses ». Pour être précis, alors que le secteur des matières premières est en plein boom, le reste de l'économie montre des signes tangibles de faiblesse. Il est clair que l’avenir de la Chine joue un rôle critique dans le maintien à flot de l’économie australienne et qu’il peut avoir un impact important sur de nombreux secteurs de l’économie mondiale. Il est également manifeste que le boom industriel de la Chine montre des signes de ralentissement. Pour l’instant, l'Empire du Milieu s’est attaché à gérer ce ralentissement de façon relativement ordonnée. Tant que ceci sera le cas, nous pensons que l’économie mondiale peut encore se redresser. Mais un coup de frein brutal de la croissance économique chinoise constitue l'un des plus gros risques actuels pour les marchés.

De manière générale, nous préférons investir dans des actions de sociétés qui profitent de positions concurrentielles solides ou d'avantages compétitifs importants lorsque nous les achetons avec une décote. Voici quelques-unes de nos meilleures idées dans le contexte actuel.

CINQ ACTIONS A ACHETER

Laboratoire pharmaceutique d’envergure mondiale, Roche est une société suisse connue tant pour ses activités de biopharmacie que de diagnostic. Elle a procédé au cours des années à plusieurs acquisitions dont la société de biotechnologie américaine Genentech et de celle de diagnostic Ventana. Sur la base de son solide portefeuille de médicaments et de ses capacités de diagnostic en tête du secteur, nous accordons à Roche un fort avantage économique (Economic Moat). Les brevets du portefeuille de Roche en font l’un des laboratoires de biotechnologie les moins exposés à la concurrence des génériques. Et de nouveaux médicaments, qui pourraient améliorer l’efficacité de ces produits actuels ou constituer de nouveaux traitements pour les patients atteints d’un cancer, sont en développement. En fait, nous estimons que Roche jouit de l’environnement concurrentiel le moins menaçant de l’industrie.

En plus de cette position concurrentielle solide, nous pensons également que la valorisation de Roche est attrayante. La société s’échange actuellement à une décote d’environ 15 % de notre estimation de sa juste valeur, à savoir 190 francs suisses par action, et nous estimons que l’action a pâti d’une année 2011 difficile. Dans notre univers de 1.800 valeurs, seule une poignée de sociétés bénéficiant d’un avantage concurrentiel important s’échangent avec une décote par rapport à leur Fair Value.

La plus grande partie du potentiel de la division pharmaceutique de Roche est issue de sa relation de longue date avec Genentech. Roche a d’abord acquis une participation majoritaire dans Genentech en 1990 et détenait presque 56 % de la société avant que le conseil d’administration de Genentech accepte en mars 2009 son offre de 95 dollars par action visant à acquérir la totalité de la société. Le portefeuille de Genentech composé de produits phares anticancéreux, dont Avastin, Rituxan et Herceptin, continue à croître rapidement alors que les médicaments gagnent des parts de marchés pour des indications approuvées et recueillent de nouvelles approbations pour de nouvelles indications. Les ventes d’Avastin aux États-Unis ont récemment reculé pour le cancer du sein car la FDA lui a retiré son approbation pour cette indication (la couverture maladie pourrait également être retirée). Cependant, nous pensons que la hausse des ventes d’Avastin hors des États-Unis et d’Europe, ainsi que la récente autorisation du médicament contre le cancer de l’ovaire en Europe, devraient en partie diminuer la pression sur le produit. Bien que les resserrements budgétaires gouvernementaux puissent menacer sur le long terme les prix élevés de nombreux médicaments, la réforme des soins de santé aux États-Unis semble anodine et nous estimons que la nature différenciée des produits de Roche et leur caractère vital protégeront la société contre de trop fortes pressions sur les prix.

Nous pensons que la décision de Roche d'absorber totalement Genentech est tombée à point nommé. La structure commerciale de Genentech aux États-Unis est suffisamment mature pour compléter les opérations internationales de Roche, sans investissements supplémentaires significatifs. Roche sécurise également ses droits sur les médicaments de Genentech en voie de développement, son option de commercialiser sous licence des médicaments à venir de Genentech devant initialement expirer en 2015. L'acquisition pourrait aussi faciliter le partage de l'information entre les chercheurs de Genentech et de Roche, stimulant ainsi la productivité de la recherche et du développement et les offres de médecine personnalisée qui tirent parti de la division diagnostics de Roche.

L’activité diagnostic de Roche est également dynamique. Avec une part de 20 % du marché mondial du diagnostic in vitro, Roche est de loin le numéro un dans cette industrie face à des concurrents tels que Siemens, Abbott et Johnson & Johnson. Bien que la concurrence sur le marché des soins du diabète et l'acquisition coûteuse de Ventana aient pesé sur la marge d'exploitation de cette division en 2008, nous pensons que la position de leader du marché de Roche et sa croissance continue, et supérieure à celle du marché, sont de bon augure pour la rentabilité. La nouvelle division de diagnostic tissulaire (depuis l’acquisition de Ventana) se développe rapidement en raison de la demande d’immunohistochimie automatisée et de diagnostic du cancer. De nouveaux instruments, ainsi que le lancement de nouveaux tests immunologiques pour des maladies telles que la polyarthrite rhumatoïde et l'hépatite C, ont stimulé la division des diagnostics professionnels.

Nous pensons que la gamme actuelle de produits de Roche et le nombre croissant de diagnostics et de médicaments candidats prometteurs en cours de développement sont de bon augure pour soutenir la rentabilité future de ce géant suisse de la santé.

BG Group

Nous valorisons l'action BG Group à 2.000 pence, soit un ratio VE/EBITDA de 9,3. Selon nous, BG mérite un multiple de valorisation élevé en raison du potentiel de croissance de sa production. Si le gaz naturel représente 70 % de la production de BG, 50 % des ventes sont indexées sur le pétrole grâce au GNL. L’apport du GNL australien et des volumes de production brésiliens devrait porter à 70 % d'ici 2015 la part des ventes indexées sur les prix du pétrole. BG a décidé de tabler sur un repli des bénéfices du GNL sur 2011-2012 dans l’anticipation d’un marché peu porteur. Toutefois, une tension de l’offre est attendue à partir de 2013, ce qui devrait conduire à une amélioration des profits.

Les optimistes disent

- Le partenariat de BG avec Petrobras dans les champs du bassin de Santos au Brésil pourrait permettre la récupération de plus de 6 milliards de barils d’équivalent pétrole. 

- Les ressources de BG en Australie pourraient se traduire par la mise en place d’un troisième train de GNL.  

- Les participations du groupe dans les champs brésiliens ne sont pas concernées par la nouvelle législation récemment mise en œuvre par le gouvernement.

- Le gaz naturel devrait être plébiscité en tant que source d’énergie à l’heure où les gouvernements adoptent des lois visant à réduire les émissions de dioxyde de carbone.

- Les perturbations passées qui ont touché l'approvisionnement de l'Europe en gaz russe ont été source d'inquiétudes et jouent en faveur des groupes qui, tels que BG, fournissent du GNL au continent.

Les pessimistes disent

- Une surabondance de gaz issue des nouveaux projets de GNL et de sources non conventionnelles pèseront à court terme sur les prix et les marges.

- Les ressources à bas coût de BG risquent d’être compromises si les pays dans lesquelles elles se trouvent tentent de renégocier les contrats ou de modifier les régimes fiscaux des producteurs.

- BG n'exploite pas ses riches concessions au Brésil, où il dépend de Petrobras en matière de développement. Or, ce dernier pourrait accorder la priorité à d’autres champs, ce qui empêcherait BG d'atteindre un niveau de production conforme à ses prévisions.

- La découverte de ressources de gaz non conventionnel en Europe et en Chine pourrait menacer la viabilité des projets de GNL et remettre en cause l’indexation sur les prix du pétrole.

Oracle

En raison de l’ampleur des risques et coûts associés au changement de logiciels d'entreprise, Oracle peut compter sur une clientèle fidèle, ce qui lui assure une rentabilité opérationnelle élevée. Ses flux de trésorerie annuels disponibles atteignent plus de 30 % de son chiffre d’affaires. Compte tenu de l’attachement de sa clientèle à ses produits et de la solidité de ses relations avec de grandes entreprises, Oracle dispose du temps et des ressources nécessaires à la mise en œuvre de stratégies de type « cloud ».

Les optimistes disent

- La rapidité de la croissance des ventes d’Exadata, d’Exalogic et d’Exalytics valide la solide proposition des systèmes conçus par Oracle.

- La stratégie d’Oracle va contraindre IBM à réagir sans altérer son modèle d'entreprise axé sur les services.

- L’hégémonie d’Oracle dans les technologies de bases de données en fait la plateforme incontournable pour les concepteurs d’applications SaaS.

Les pessimistes disent

- Faire évoluer son modèle d’entreprise constitue le défi le plus délicat à relever et Oracle peut tout à fait échouer dans ses efforts visant à adapter son offre à un modèle fondé sur l’abonnement.

- Les bases de données « open source », telles que MySQL (à présent propriété d’Oracle), Ingres et PostgreSQL, qui sont plébiscitées par les petites entreprises, menacent la position hégémonique d'Oracle sur le marché des bases de données.

- De petites entreprises du secteur informatique, telles que Rimini Street, proposent des services d'assistance plus abordables pour les logiciels Oracle, ce qui pèse sur le chiffre d’affaires du groupe dans la maintenance.

Fiat Group

Fiat n’a pas fini d’exploiter le potentiel d’économies d’échelle considérable que lui offre son investissement dans Chrysler. Fort de sa position de leader sur le marché brésilien et de sa présence dans d’autres marchés en développement, Fiat est en mesure d'assurer la croissance de son chiffre d’affaires au-delà de son marché intérieur. Le niveau élevé de la base des coûts fixes et la main d’œuvre très syndiquée du groupe en Italie pourraient compromettre fortement le potentiel de Fiat en termes de levier d’exploitation.

Les optimistes disent

- L’alliance avec Chrysler confère à Fiat un potentiel d'économies d'échelle et de pouvoir d'achat que le constructeur italien aurait peiné à obtenir tout seul.

- Fort de sa position de leader sur le marché brésilien et de sa présence dans d’autres marchés en développement, Fiat est en mesure d'assurer la croissance de son chiffre d’affaires au-delà de son marché intérieur.

- Les réglementations en matière d’émissions polluantes profitent à Fiat d’un point de vue stratégique compte tenu de son expertise dans les petites voitures et les motorisations économes en carburant. Par ailleurs, dans un contexte de durcissement des lois américaines sur les émissions polluantes, les technologies en matière de petits moteurs devraient profiter à Chrysler.

Les pessimistes disent

- L’industrie automobile mondiale pâtit de surcapacités qui accroissent les pressions sur les prix et érodent la rentabilité des constructeurs.

- Fiat et Chrysler ont une main d’œuvre fortement syndiquée, ce qui peut également nuire à leur rentabilité si les salariés réclament des augmentations de salaire ou font obstacle à des réductions d’effectif.

- Fiat affiche un niveau d’endettement élevé qui, en cas de nouvelle chute importante des volumes, le contraindrait à consacrer une large part de sa trésorerie au service de la dette, au détriment de réinvestissements dans ses activités.

HSBC

HSBC, ancré de longue date en Asie, où le secteur bancaire affiche une croissance rapide des bénéfices, est bien placé pour profiter de l'évolution des dynamiques commerciales mondiales. La concurrence s’intensifie en Asie, notamment à Hong Kong (le principal marché de HSBC sur le continent asiatique) et les marges bénéficiaires diminuent. Plus grave : une bulle immobilière semble guetter l’Asie, Hong Kong en particulier, et un retournement du marché pourrait entraîner de lourdes pertes. Le plan de réorganisation adopté par HSBC permettra au groupe de se recentrer sur ses métiers les plus porteurs de banque commerciale à l'échelle mondiale tout en se séparant de ses activités non stratégiques déficitaires.

Les optimistes disent

- L’exposition d’HSBC aux économies les plus dynamiques et aux régions créatrices de richesses lui garantit une solide demande pour l’ensemble de ses produits et services, depuis les comptes courants jusqu’à la gestion de fortune.

- Les avantages de la diversification géographique du groupe ont été mis en lumière au cours de la crise financière. S’il a accusé de lourdes pertes en Amérique du Nord, ses activités à Hong Kong, en Asie et en Europe ont pris le relais et HSBC s’en est quand même mieux sorti que la plupart de ses concurrents en Europe et en Amérique du Nord.

- HSBC a renforcé sa notoriété auprès des entreprises et des particuliers en lançant une vaste offensive de promotion de sa marque et de son slogan uniques et en remportant plusieurs prix.

- Sa solide présence à Hong Kong et en Chine en fait la banque incontournable des multinationales très actives en Chine.

- Grâce à la rémunération incitative du personnel d’encadrement, le souci de la rentabilité, de la maîtrise des coûts et du rendement pour les actionnaires est garanti, ce qui fait de HSBC une valeur attrayante.

Les pessimistes disent

- En raison de l’étendue de son réseau, HSBC n’est pas aussi efficace en matière de contrôle des coûts que certains de ses concurrents de moindre envergure.

- Sa présence dans les pays en développement expose le groupe à un risque de crédit supérieur à la moyenne et, en cas de crise mondiale, à une prolifération des dépréciations de créances.

- HSBC a sous-estimé de plusieurs milliards les pertes qu’allait accuser son portefeuille de prêts hypothécaires subprime lors de la crise de 2007-2008. Il est permis de se demander si une telle erreur, qui souligne la difficulté de gérer un groupe aussi tentaculaire, pourrait se reproduire.

- La rentabilité de HSBC pourrait être affectée par un abandon de la politique chinoise d’ « une nation, deux systèmes » conduite à Hong Kong.

CINQ ACTIONS A EVITER

Il va de soi qu’avec des marchés étant proches de leur Fair Value, certaines valeurs ne sont pas à acheter. En voici cinq à éviter.

Seagate Technology apparaît comme un titre à éviter pour deux raisons principales : notre analyse révèle que la société est, sur le plus long terme, dans une position concurrentielle fragile et nous pensons que les actions sont particulièrement survalorisées. Seagate fabrique des disques durs pour le stockage d'informations sur des serveurs, des ordinateurs personnels, des ordinateurs portables et des consoles de jeu. La société génère environ la moitié de ses revenus en Asie et le reste en Europe et aux États-Unis. Elle a profité de la dislocation de l’industrie lors des inondations en Thaïlande qui ont causé des problèmes de production à son principal concurrent, Western Digital.

Ceci a permis à Seagate d'imposer ses prix, selon nous, exagérément élevés. Une fois que Western Digital aura totalement retrouvé ses capacités de production, nous pensons que les prix se normaliseront et que le cours de l’action de Seagate devrait redescendre à des niveaux normaux. Du point de vue de la valorisation, nous estimons que les actions de Seagate sont survalorisées de plus de 60 % car, selon nous, le marché extrapole les prix élevés bien trop loin dans le futur. Sur le plus long terme, nous discernons plusieurs menaces majeures au modèle d’entreprise de Seagate, dont les SSD et l’arrivée de Western Digital sur le segment du disque dur d’entreprise historiquement dominé par Seagate.

Les tendances à long terme en matière de stockage ont été une aubaine pour les fabricants de disques durs au cours des dernières années. Au cours des huit dernières années, à l’exception de 2009, la production de l’industrie a connu des taux de croissance supérieurs à 10 % par an. Même si ces tendances de long terme sont toujours d’actualité, l’émergence de technologies de substitution représentent une menace grandissante.

Les SSD qui utilisent des mémoires flash NAND, constituent la principale menace qui pèse sur les fabricants de disques durs. La technologie NAND présente des avantages de performances significatifs par rapport à la technologie disque dur, dont une vitesse de lecture/écriture plus grande et une plus faible consommation qui constituent des avantages indéniables alors que l’informatique tant personnelle que professionnelle devient de plus en plus mobile.

Le second risque technologique important auquel les fabricants de disques durs font face est la cannibalisation de la demande d'ordinateurs personnels par les tablettes numériques. Bien qu’il soit trop tôt pour prédire le taux de cannibalisation des ordinateurs personnels, des études sur des utilisateurs de tablettes numériques révèlent pour l’instant que 15 à 35 % des tablettes achetées l’ont été à la place d’un ordinateur portable. Même si l’usage des tablettes a pour effet annexe de créer de la demande de stockage ailleurs, c'est-à-dire dans le « cloud », nous pensons que les disques durs utilisés pour le stockage de type « cloud » connaîtront un déclin rapide et continu de leurs prix car les assembleurs cherchent à extraire toute source de valeur, aussi petite soit-elle, de leurs fournisseurs de matériels informatiques.

Néanmoins, les prix des SSD ne devraient pas baisser suffisamment pendant encore quelques années et les disques durs auront encore leur place sur le marché tant que cette différence existera. La technologie des SSD coûte à l’heure actuelle 5 à 20 fois plus cher que celle d’un disque dur. Bien que les coûts de la technologie des SSD baissent rapidement, ceux de la technologie des disques durs font de même. Les baisses des disques durs sont essentiellement dues à un accroissement de la densité en bits par pouce carré, ou le nombre de gigaoctets qui peuvent être stockés sur un plateau de disque dur. En 2012, la densité en bits par pouce carré devrait augmenter de 20 à 30 %, ce qui devrait entraîner une réduction des coûts par gigaoctet du même ordre. Cette augmentation de la densité est liée aux raffinements de l’enregistrement magnétique perpendiculaire. L’enregistrement magnétique par procédé thermique devrait devenir la norme de l’enregistrement magnétique perpendiculaire d’ici 2013 et par conséquent, nous pensons que la hausse annuelle de 30 à 40 % de la densité devrait se poursuivre dans les années à venir.

Les réductions de coûts qui en résultent devraient être suffisantes pour maintenir les SSD à la périphérie du marché, étant donné que les réductions de coûts annuelles de la technologie NAND devraient être de 35 à 40 % au cours des quelques années à venir.

La question n’est plus de savoir si les disques durs vont décliner mais plutôt à quel moment et jusqu’à quel point, car les coûts de la technologie NAND (et ceci inclut les tablettes numériques et en particulier les SSD) deviennent de plus en plus compétitifs. Une fois que les volumes commenceront leur longue chute, les fabricants de disques durs restants seront confrontés à une combinaison toxique de compétition intense sur les prix et de réduction des volumes. Même si ce scénario est improbable pour les trois à quatre années à venir, il sera très difficile de faire la distinction entre un déclin cyclique et un déclin à long terme lorsqu’il débutera.

Prudential

Prudential est une marque de premier ordre en Asie où le groupe a réalisé 40 % de son chiffre d’affaires en 2011 grâce à un réseau efficace d’agents et de distribution dans la bancassurance. Le groupe a commencé à se délester de ses investissements en dette souveraine européenne en 2009. Peu exposé à cette dernière, il a ainsi pu se tenir largement à l'écart de la crise de la dette. Aux États-Unis, Prudential est peu actif dans les contrats de type « variable annuities ». Bien que Prudential soit un acteur phare du marché et qu’il ait intégré dans ses prix les risques d’une dégradation de l’économie, une faiblesse durable des taux d’intérêt finira par peser sur ses marges.

Les optimistes disent

- La solidité de sa marque et l’étendue de sa plateforme de distribution permettent à Prudential Asia de tirer profit du développement rapide de la classe moyenne dans la région.

- Même si le groupe est peu actif dans les contrats  « variable annuities » aux Etats-Unis, son programme de couverture se révèle efficace pour soutenir le bilan dans les périodes de tensions sur le marché.

- Malgré les nombreux changements à la tête du groupe ces dernières années, nous pensons que l’équipe de gestion actuelle est bien partie pour devenir l’une des plus performantes du secteur.

Les pessimistes disent

- Prudential dépend beaucoup des revenus de ses placements pour financer ses prestations d’assurance. Le groupe tire un tiers de son chiffre d’affaires du rendement total de ses placements, une proportion supérieure à la moyenne du secteur.

- Bien que Prudential ait une longueur d’avance en Asie, il va probablement faire face à une concurrence croissante de la part d’autres compagnies d'assurance vie établies en Chine, à mesure que les marchés s'ouvrent.

- La réorientation du groupe en faveur d’un mix produits plus prudent au Royaume-Uni et en Europe devrait s’accompagner de nouvelles pressions à la baisse sur les marges.

Hermès

Hermès continue d’enregistrer une forte croissance, sa marge opérationnelle avoisinant les 30 %, nous tablons sur une augmentation des dividendes et sur la préservation de la trésorerie au sein du bilan. Selon nous, les investisseurs ne mesurent pas à sa juste valeur le rôle que joue le tourisme de luxe dans les ventes du groupe à Paris, Londres ou New York. Si le tourisme de luxe a toujours constitué un moteur significatif de ce marché, nous pensons qu’Hermès est plus exposé à un ralentissement économique en Chine.

Les optimistes disent

- Hermès est l'une des marques de luxe les plus recherchées au monde.

- La demande pour son sac Birkin a, à de nombreuses reprises, dépassé l’offre, les clients se retrouvant sur une liste d'attente ; ce phénomène a contribué à renforcer le statut de la marque.

- Hermès a surmonté les hauts et les bas des cycles économiques et la versatilité des tendances depuis plus de 170 ans.

- Le groupe affiche régulièrement une marge opérationnelle élevée, ce qu’il doit essentiellement à sa capacité de dicter ses prix.

- L’exposition du groupe à la Chine et aux marchés en développement constitue un avantage et le restera durant les années à venir. Le segment des consommateurs fortunés va se développer plus rapidement que les autres. Les consommateurs chinois sont encore plus sensibles aux marques et à la consommation ostentatoire que leurs homologues occidentaux.

Les pessimistes disent

- Hermès est très exposé à l’essor économique de la Chine. Sa valorisation actuelle se révélera excessive lorsque les investissements chinois ralentiront.

- Au sein de notre univers de valeurs du luxe, Hermès est l’une des marques pour lesquelles la composante mode joue un rôle des plus déterminants. Or, si les marques de mode tendent à produire une rentabilité élevée des fonds propres à moyen terme, leur succès est limité dans le temps.

- Même si les investisseurs pensent que la croissance chinoise va perdurer, il est peu probable, en dépit de la puissance actuelle de la marque, que les sacs Hermès puissent conserver leur caractère d'exclusivité tout en étant omniprésents, et qu'aucune autre marque ne fasse son apparition.

- Si les achats de produits Hermès par les adeptes du tourisme de luxe en Europe venaient à baisser, ou bien si l’écart de prix entre les États-Unis et la Chine venait à se réduire, la capacité des touristes à financer leurs achats de luxe par le biais de ventes privées une fois rentrés dans leur pays serait plus limitée.

- La valorisation actuelle d’Hermès demeure soutenue par les spéculations autour d’un rachat du groupe par LVMH. Compte tenu de la faiblesse du flottant et de la nouvelle structure du groupe en société holding, une telle opération est peu probable, et il serait bien difficile à quiconque de sortir du capital aux cours actuels.

Infineon Technologies

Infineon s’est séparé, ces dernières années, de certaines de ses activités peu rentables ce qui, selon nous, soutiendra sa rentabilité durant les années à venir.

Le groupe paraît bien placé pour profiter du développement du marché des semi-conducteurs pour l’automobile, les voitures à essence étant de plus en plus équipées de capteurs et de dispositifs d’affichage électronique, tandis que la motorisation des véhicules hybrides et électriques fait également appel aux semi-conducteurs. Infineon génère une marge brute et une rentabilité inférieures à celles de ses pairs, même si le groupe pourrait finir par rattraper une partie de son retard.

Les optimistes disent

- Infineon jouit d’une offre et d’une réputation solides sur le segment des semi-conducteurs industriels, un marché relativement stable et rentable.

- Le groupe se concentre désormais sur ses marchés clés (industrie, automobile, sécurisation de cartes) après avoir intelligemment cédé une série d’activités peu rentables.

- Le marché des semi-conducteurs pour l’automobile pourrait connaître une croissance robuste durant les prochaines années, les voitures à essence étant équipées de capteurs et de dispositifs d’affichage électronique, tandis que la motorisation des véhicules hybrides et électriques fait également appel aux semi-conducteurs.

- Si le groupe a enregistré de bonnes performances dans les puces électroniques pour cartes ces dernières années, la majorité des cartes de type passeports, cartes d’identité, etc. font encore appel à des bandes magnétiques, ce qui assure à Infineon une marge de progression à l’avenir.

Les pessimistes disent

- Malgré les efforts du groupe pour rationaliser sa production et réduire ses coûts, la rigidité de la réglementation du travail en Allemagne rend toute restructuration prohibitive et longue.

- En dépit de récentes initiatives visant à améliorer sa rentabilité, Infineon continue d’afficher une marge brute et un résultat opérationnel inférieurs à ceux d’autres fabricants à succès de semi-conducteurs analogiques.

- L’industrie des semi-conducteurs est fragmentée et Infineon est en concurrence avec de nombreux fabricants bien établis et solidement capitalisés.

Sears

En 2012, en dépit d’une base de comparaison favorable, Sears Holdings pourrait encore voir ses performances se dégrader avant de connaître un redressement. Le marché du logement montre des signes de reprise mais les ventes d’électroménager restent moribondes. Nous estimons que la croissance des grands concurrents du groupe, dans la distribution généraliste comme dans les biens durables, sera limitée à 1-3 % au cours des cinq prochaines années, alors que la plupart des distributeurs affichaient au milieu des années 2000 une croissance à deux chiffres. Même s’il a récemment annoncé de piètres résultats opérationnels et un endettement en hausse, Sears dispose encore d’un accès au crédit, d’actifs immobiliers et de marques solides.

Les optimistes disent

- Sears continue de produire d’importants flux de trésorerie qui, ces dernières années, lui ont servi à racheter des actions et à rembourser sa dette. La capacité bénéficiaire du groupe est susceptible d’augmenter sensiblement à mesure que les marchés de l’électroménager et du matériel informatique s’amélioreront.

- Le groupe compte des actifs non négligeables dans l’immobilier. Ces actifs peuvent être valorisés au moyen de cessions-bails, de partenariats dans la vente au détail et dans la distribution via des ventes en ligne.

- Fort d’une participation déjà supérieure à 60 %, encore accrue par de récents achats de titres sur le marché, Eddie Lampert pourrait décider de racheter les minoritaires de Sears dans le but d’optimiser la structure de coûts du groupe, d'alimenter les caisses de retraites sous-capitalisées, de réinvestir dans les magasins et de relancer les ventes en électroménager.

- Au Canada, le positionnement de la marque Sears en termes de gamme est plus élevé, dans l'esprit des consommateurs, qu'aux États-Unis et le groupe est bien placé pour produire des flux de trésorerie stables sur ce segment. En 2010, Sears Canada affichait une valeur comptable de plus de 3 milliards de dollars, soit quasiment la valeur comptable de l’ensemble du groupe aujourd’hui.

- Les marques du groupe, Craftsman, Kenmore, Diehard et Lands'End, ont une valeur certaine, qu’elles soient ou non distribuées chez Sears et Kmart. Les efforts visant à en faire des activités à part entière devraient finir par porter leurs fruits et créer réellement de la valeur. Internet constitue par ailleurs pour les marques de Sears un relais de croissance permettant au groupe d’atteindre un public plus large que dans ses magasins.

Les pessimistes disent

- Sears ne peut pas compter simplement sur une « cure amaigrissante » pour améliorer sa rentabilité. Ses ventes continuent de baisser aussi vite, voire plus rapidement, que ses réductions de coûts et de stocks. Fermer des magasins ne sera pas suffisant.

- La concurrence, intense, continuera d’affecter les ventes de biens durables. Home Depot et Lowe’s vont encore conquérir des parts de marché dans l'électroménager et le matériel informatique, Target et Wal-Mart, pour leur part, vont poursuivre leur progression dans l’électronique et l’équipement de la maison et les distributeurs spécialisés tels que Best Buy et HHGregg exploiteront les créneaux intermédiaires nécessitant davantage de services et de sélectivité.

- Sears, malgré ses efforts, continuera à rencontrer des difficultés dans les biens non durables. Ces articles font l'objet d'une concurrence encore plus féroce et leurs résultats financiers ont tendance à être volatils. Les distributeurs généralement puissants dans les biens durables ont rarement lancé des stratégies efficaces dans les biens non durables.

- Le rachat d’actions par l’actionnaire principal du groupe, Eddie Lampert, et l’utilisation de l’excédent de trésorerie pour de nouveaux investissements accroissent les risques et se font au détriment du réinvestissement dans les magasins. Il se peut qu’Eddie Lampert ait sous-estimé les risques concurrentiels de la distribution généraliste, après avoir redressé Auto Nation.

- Si le groupe continue d'accumuler les pertes et de creuser son endettement en 2012, la réticence des fournisseurs à livrer les marchandises ou à faire appel à un affactureur (tel que CIT Group) pourrait impacter la qualité et la ponctualité des livraisons, ce qui risquerait d’asphyxier Sears, quand bien même il serait sur la voie du redressement.

Cet article a été initialement publié dans le magazine Morningstar Professional de juin 2012. 

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