Les gérants actifs apportent-ils de la valeur ?

Gérants actifs et passifs sont tous les deux nécessaires au bon fonctionnement des marchés.

Jocelyn Jovène 24.07.2017
Facebook Twitter LinkedIn

Depuis l’article de Michael Jensen en 1968, « l’alpha » est devenu une mesure populaire de la valeur des gérants actifs. Il mesure leur capacité à produire à un rendement supérieur au rendement attendu de leur portefeuille, calculé à partir du modèle d’évaluation des actifs financiers (CAPM).

De nos jours, l’alpha reste une mesure populaire pour mesurer les talents du gérant en matière de sélection de titres. D’autres facteurs (la chance par exemple) et d’autres mesures (Treynor, Sortino, ratio d’information…) ont été développés ou pris en compte pour tenter de mieux cerner la contribution d’un gérant actif.

Apport informationnel

Dans un monde où la gestion passive, à travers les fonds indiciels et les ETF, a pris une place grandissante, quelle place peuvent avoir les gérants actifs ?

Certains travaux ont essayé de répondre à cette question en regardant la contribution des gérants passifs et actifs à l’efficience des marchés financiers.

D’une certaine manière, en répliquant des indices, la gestion passive n’améliore pas l’efficacité du marché puisqu’elle n’est détentrice d’aucune information nouvelle et ne s’appuie sur aucune recherche spécifique. Elle part du postulat que le prix du marché est efficient et qu’il n’est pas possible de battre un indice.

A contrario, le gérant actif est supposé apporter une valeur informationnelle au marché, en exploitant de possibles « anomalies », lorsque le prix de marché s’éloigne de la valeur intrinsèque du prix d’un actif.

Efficience des marchés

Comme l’indiquent les analystes quantitatifs d’UBS dans une série d’études sur la gestion active/passive, les fonds indiciels et ETF ont besoin des gérants actifs, lesquels apportent la liquidité nécessaire pour ajuster les positions de portefeuille.

En outre, l’information sur la valeur des actifs financiers est coûteuse, justifiant le paiement de frais de gestion. Aussi, les investisseurs qui n’ont pas les capacités de recherche devraient se contenter d’investir de manière passive, tandis que les investisseurs disposant de ressources suffisantes pourraient s’orienter vers la gestion active.

« Le coût de l’information diminuant, il faut moins de gérants actifs pour maintenir l’efficacité des marchés », écrivent les analystes d’UBS. « La percée de la gestion passive reflète cette tendance. »

Cela ne veut pas dire pour autant qu’il ne faut pas de gérants actifs, ceux-ci étant importants pour contribuer à l’efficacité informationnelle du marché. Sans leur présence, les fonds indiciels n’auraient pas connu le succès.

Volatilité

Dans quelles circonstances les gérants actifs apportent-ils de la valeur ? Certains travaux ont montré que les gérants actifs créent de la valeur quand la volatilité des marchés augmente et lorsque la corrélation est faible (graphique).

Active volatility correlation UBS Jan 2017

La dispersion des rendements des titres financiers dépend avant tout de l’évolution des résultats des entreprises cotées, qui dépend en partie de l’environnement économique général.

Dans un monde de faible croissance et de faible inflation, et où de surcroît les politiques des banques centrales distordent les niveaux de valorisation de l’ensemble des classes d’actifs (avec à la clef plus de prises de risque de la part des investisseurs en quête de rendement), l’incertitude macro-économique tend à évoluer de pair avec le niveau de corrélation entre actifs.

Cet environnement a été particulièrement difficile à naviguer pour de nombreux gérants actifs qui ont sous-performé les indices boursiers et contribué à la popularité de la gestion passive. Mais cette situation n’est pas irréversible.

A la recherche des bons supports

Les investisseurs et leurs conseillers doivent mettre en place un process solide pour sélectionner les gérants actifs comme passifs et mettre en place une allocation d’actifs solide.

Les investisseurs ont aujourd’hui accès à une palette d’outils différents pour atteindre leurs objectifs financers : gestions actives (toutes classes d’actifs), gestion alternative, fonds concentrés, fonds quantitatifs.

Dans un monde où le rendement des actifs est appelé à baisser – en raison du vieillissement démographique et du recul des gains de productivité – la gestion passive ne peut apporter qu’une partie de la solution aux investisseurs. Il est donc important pour ces derniers de trouver le bon mix entre gestion active et passive, en portant toujours une grande attention aux frais de gestion, notamment.

 

 

 

Facebook Twitter LinkedIn

A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.