Asie : les investisseurs européens prudents

L’analyse des données de collecte depuis 2007 montre une nette préférence pour la dette asiatique. Les actions chinoises ont été les plus boudées.

Jocelyn Jovène 20.02.2017
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Les gérants actifs européens spécialistes de l’Asie ont connu des sorts divers depuis 2007. L’analyse des données de collecte des catégories Morningstar sur la zone asiatique montre des évolutions divergentes entre d’un côté la dette asiatique, qui a plutôt recueilli le suffrage des investisseurs, et de l’autre les actions, plutôt délaissées.

En fait, au sein de cette dernière classe d’actifs, des mouvements parfois très contrastés dans les flux de collecte ont marqué les dix dernières années. Ainsi, les fonds actions ASEAN (Association des pays d’Asie du Sud-Est) et les fonds actions de Hong-Kong ont respectivement collecté 956 millions d’euros et 1,44 milliard d’euros en cumulé entre 2007 et 2016, avec une collecte positive en 2016 pour les premiers et négative pour les seconds.

A l’inverse, les fonds d’actions chinoises (actions A ou H) ont subi des décollectes massives de respectivement 2 et 7,6 milliards d’euros au cours de la même période. Les fonds « Grande Chine » (Chine, Hong-Kong et Taiwan) ont également décollecté à hauteur de 3,8 milliards d’euros.

La Chine n’est pas le seul pays où les actions ont été délaissées : les fonds actifs spécialistes des actions indiennes ont subi 4,1 milliards d’euros de sortie en 10 ans. On observe également des mouvements de sorties des fonds spécialistes de la Thaïlande (2,5 milliards) et dans une bien moindre mesure d’Indonésie ou de Singapour (respectivement 43 et 389 millions d’euros de sorties nettes).

La période plus récente marque également un désintérêt pour les actions asiatiques et peu de pays, comme le Vietnam, parviennent à attirer les investisseurs, quoique dans des proportions modestes.

Au final, c’est la dette asiatique qui sort grande vainqueur de ces dix dernières années. Marqués par la crise asiatique de 1997, de nombreux pays de la région se sont attachés à assainir leur bilan, et à engager des réformes structurelles. Cela se retrouve aujourd’hui dans des données macro-économiques un peu meilleures aujourd’hui qu’il y a 20 ans.

L’irruption de la Chine à partir de 2001 sur la scène économique et financière internationale et son développement rapide a servi de moteurs à de nombreuses économies de la région. Mais cela est aussi une source de risques pour le moyen terme.

L’Asie est également sensible aux évolutions des parités monétaires. L’appréciation du dollar américain a créé de la volatilité sur la plupart de devises émergentes et la divergence des politiques monétaires, notamment la normalisation de la politique de la Fed, est une source d’incertitude qui entraîne d’importants flux financiers entre les régions du monde.

La gestion par la Chine du ralentissement de son économie et la transition vers une économie plus centrée sur les services est un autre facteur d’incertitude et de prudence pour de nombreux investisseurs. Les autorités chinoises ont connu quelques ratés à l’été 2015 et fin 2016. Le ralentissement chinois a été une source de volatilité pour le prix de plusieurs matières premières, ce qui a pénalisé la situation financière de nombreux pays de la zone.

Tout ceci a contribué à rendre les fondamentaux des pays de la région moins prévisibles, et explique sans doute pour partie les raisons d’une préférence pour les classes d’actifs les plus sûres ainsi que la volatilité des bourses en Asie.

Evolution des flux par catégories Morningstar

Flows Asia Assets 2007 2016

Source: Morningstar

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A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.