Commentaire macro-économique trimestriel de Morningstar

La croissance mondiale a peu évolué depuis le mois juillet. Les craintes de récession semblent avoir reculé, analyse Francisco Torralba de Morningstar.

Francisco Torralba 28.10.2016
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La croissance mondiale a peu évolué depuis le mois juillet. Selon les indicateurs des directeurs d’achat et les prévisions en temps réel, la croissance s’est légèrement redressée au cours du troisième trimestre.

Légère reprise

Par rapport aux tendances observées l’an dernier, qui évoluaient plutôt autour de 2,5%, l’économie mondiale semble évoluer sur un rythme un peu plus soutenu de 3,5%. Les craintes de récession ont donc reculé, même si une grande partie du monde avancé se trouve plus en fin de cycle. Ce stade est caractérisé par une croissance modérée, un resserrement du crédit et un repli des profits des entreprises.

Un point crucial est la reprise de l’activité dans le monde émergent. Les récessions au Brésil et en Russie ont probablement atteint leur terme, tandis que la croissance économique chinoise semble avoir accéléré au cours des deux derniers mois. Si cela se confirmait avec les prochaines statistiques, ce serait la première fois depuis 2015 que l’économie chinoise croit au-dessus de sa tendance.

« Output gap »

Les indicateurs en temps réels pour les économies avancées évoluent sous leur tendance en 2016, comme cela fut le cas pour la plupart de l’année 2015. Si l’on fait abstraction du bruit de court terme, les économies matures semblent évoluer sur un rythme de près de 1,5% l’an, en-dessous de leur trend.

En apparence, cela signifie que « l’output gap » (écart entre la croissance observée et la croissance potentielle) s’est accru. Mais il est difficile de réconcilier cela avec les tensions observées sur les marchés du travail dans plusieurs pays. Il semble plus probable que nous avons surestimé la croissance potentielle et que les économies matures évoluent à un rythme proche de potentiel de moyen terme.

Pétrole et matières premières

Cette amélioration marginale a provoqué un rebond du prix des matières premières. L’OPEP a décidé fin septembre de réduire sa production, entraînant un vif rebond du cours du baril de brut, les marchés n’attendant pas de changement.

Il est toutefois peu probable que la décision de l’OPEP suffise à soutenir durablement les prix du pétrole. Or la réduction annoncée (750.000 barils/jour) est relativement faible par rapport à l’offre globale. Les principaux pays producteurs de l’OPEP et la Russie sont à leur maximum en termes de production.

La production d’hydrocarbures des Etats-Unis pourrait bien rebondir, si l’on en juge l’évolution du nombre de forages. La demande ne soutient pas non plus les prix, certains analystes tablant plutôt sur un ralentissement à court terme, en raison de la faiblesse croissance économique de l’Asie.

Inflation

L’inflation est faible dans les économies avancées, par rapport aux moyennes historiques et aux objectifs des banques centrales. Récemment, les chiffres d’inflation ont remonté, accompagnant le rebond du pétrole.

Une vue répandue est que compte tenu des effets de base, les chiffres d’inflation devraient continuer de remonter si les prix du pétrole se stabilisent aux niveaux actuels. Il semble peu certain, toutefois, que ce soit le cas.

Il est donc difficile d’envisager un rebond plus significatif de l’inflation à court terme. Un certain nombre de pays émergents sont confrontés à une inflation élevée en raison de la faiblesse des prix des matières premières exportées et de la faiblesse de leur devise.

L’inflation « coeur » a également progressé un peu dans les pays développés, mais pas dans les pays émergents.

Politique monétaire

La politique monétaire reste accommodante et la plupart des banques centrales maintiennent un tel biais. Pour les cinq principales banques centrales (Etats-Unis, zone euro, Royaume-Uni, Japon, Chine), l’objectif de soutenir la croissance économique et la stabilité des prix, mais elles restent également attentives au risque d’instabilité financière.

En dehors de ces zones, les taux de change continuent de jouer un rôle déterminant dans la conduite de la politique monétaire de nombreux autres pays. Cela force les banques centrales à suivre les positions des unes et des autres sans prendre en considération leur situation domestique.

Une croissance plus lente

D’un point de vue général, la croissance économique est plus faible qu’avant 2008-2009, en particulier dans le secteur industriel. L’investissement dans le capital physique a été faible et le gros de la reprise s’est fait grâce à la consommation des ménages.

Depuis 2014, la faiblesse des pays exportateurs de matières premières et de la Chine ont été les principaux détracteurs de croissance de l’économie et du commerce international.

La faiblesse de la reprise est difficilement dissociable du déclin tendanciel de long terme de la démographie et des gains de productivité.

Les marchés financiers complaisants

Les marchés financiers ont pris une vue plutôt positive de la situation. La volatilité et les primes de risque suggèrent que les investisseurs semblent se satisfaire d’une faible croissance et de taux d’intérêt bas.

Les principaux risques (stade avancé du cycle économique aux Etats-Unis, Canada, Royaume-Uni, Australie, et les vulnérabilités financières du monde émergent) sont pourtant bien présents.

Mais les marchés ignorent ces risques, tout le monde continuant d’espérer le soutien des banques centrales.

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A propos de l'auteur

Francisco Torralba

Francisco Torralba  est économiste senior au sein de Morningstar Investment Management.