Les marchés de taux européens sont en territoire inconnu – Allianz GI

Pour le gestionnaire d’actifs, les taux obligataires ont vocation à rester durablement bas.

Jocelyn Jovène 10.03.2015
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Depuis le début de la crise financière, les investisseurs sont confrontés à un environnement de marché atypique, marqué par l’interventionnisme quasi constant des banques centrales. L’annonce du « QE » de la Banque centrale européenne, le 22 janvier, ne fait que renforcer cette tendance.

« La répression financière [des banques centrales] est là pour durer », a affirmé lundi Franck Dixmier, patron de la gestion de taux en Europe d’Allianz Global Investors, qui supervise la gestion de 155 milliards d’euros d’actifs.

Pour ce responsable, la menace de la zone euro n’est pas la déflation, mais la désinflation. Cette situation, conjugée à l’intervention des banques centrales, explique en grande partie qu’une part croissante du stock de dette publique en zone euro génère un rendement négatif. A ce stade, 60% de la dette publique allemande et 40% de la dette publique française offrent des rendements négatifs aux investisseurs, ce qui n’est pas sans poser de problème.

Le « QE » a pour vocation à forcer les banques à relancer le cycle du crédit, et à forcer les investisseurs à diversifier leur base d’actifs vers des investissements de long terme. Le problème est qu’au même moment, la réglementation bancaire (Bâle 3) et celle du secteur de l’assurance (Solvency 2) limitent la capacité de ces acteurs à prendre du risque.

Banques et compagnies d’assurances sont forcées de détenir les actifs les plus sûrs et les plus liquides possibles. Mais la chute des rendements obligataires pose la question du renouvellement de leur portefeuille : lorsqu’un emprunt d’Etat arrive à maturité, son remplacement par un actif offrant un rendement suffisamment attrayant devient un vrai casse-tête.

Au même moment, l’annonce du programme d’achats d’actifs à hauteur de 60 milliards d’euros tous les mois interroge Franck Dixmier : « le stock de dette publique en zone euro est détenu à 25% par des banques, 22-23% par des assureurs et 20% par des banques centrales. Qui va vendre ? Vraisemblablement des gestionnaires d’actifs pour une part, des investisseurs internationaux et des banques étrangères », explique le gérant.

« Or si l’ajustement du marché ne peut se faire par les volumes, il se fera par les prix. Il y a de grandes chances que les taux en zone euro restent durablement bas », conclut-il.

Dans un tel environnement, les investisseurs doivent faire attention à deux risques majeurs : un risque lié à la remontée des taux pour les portefeuilles où la duration n’est pas couverte par le coupon versé ; un risque de liquidité qui a fortement baissé ces dernières années, souligne Franck Dixmier.

 

 

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A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.