BCE : après l’action, les questions

L’annonce surprise d’une deuxième baisse des taux et de rachats d'actifs a laissé certains investisseurs sur leur faim.

Jocelyn Jovène 05.09.2014
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Si l’annonce surprise d’une deuxième baisse des taux a produit son effet sur les marchés jeudi, certains observateurs sont restés sur leur faim, l’institution monétaire et son président, Mario Draghi, ayant reporté à plus tard le détail des modalités du plan d’action de la Banque centrale européenne pour lutter contre le risque de déflation et relancer une activité économique atone en Europe.

Les investisseurs ont du mal à évaluer l’ampleur des mesures annoncées, en particulier en ce qui concerne le programme de rachats d’actifs de la BCE.

Mario Draghi a évoqué l’objectif d’accroître le bilan de la BCE pour le ramener à son niveau de 2012, soit 2.750 milliards d’euros (moyenne annuelle), sachant qu’il avait atteint un pic de 3.100 milliards d’euros en juin de cette année.

Implicitement, les économistes de plusieurs banques ont calculé que cela représenterait une injection de liquidités comprise entre 750 et 1.000 milliards d’euros, mais la plupart des observateurs ont encore du mal à ventiler ces sommes entre les différents types d’actifs que la BCE sera prête à acheter.

Le gros des achats devrait porter sur des prêts titrisés, mais selon la SIFMA, le stock de prêts au terme du premier trimestre se chiffrait à 1.000 milliards d’euros, dont 151 milliards d’ABS et 601 milliards de prêts adossés à de l’immobilier résidentiel (RMBS).

« Il faudra attendre la réunion du 2 octobre pour les détails sur le programme d’achats d’actifs. D’ici là, les intervenants sont laissés en pleine ambiguïté », note Michel Martinez, économiste à la Société Générale dans une note.

Plusieurs observateurs notent le fait que la décision de la BCE n’a pas réuni l’unanimité des membres du conseil des gouverneurs, même si certains de ces membres étaient favorables à l’amplification du programme de rachats d’actifs.

Pour Rémi Lelu de Brach, gérant taux chez Quilvest, l’argument d’une baisse des taux pour s’assurer du succès du T-LTRO « semble fallacieux » : « la possibilité d’emprunter à 0,15% ou 0,25% ne change pas grand-chose ». « Nous pensons que l’objectif principal de Mario Draghi est de se démarquer encore plus fortement de la politique monétaire américaine afin de faire baisser l’euro. »

Déjà engagée depuis l’été, la baisse de la monnaie unique constitue pour le moment leur seul vecteur qui pourrait contribuer à un regain d’activité et au redressement des résultats des entreprises à court ou moyen terme.

Mais les moteurs plus fondamentaux de l’économie que sont les investissements ou la consommation restent eux désespérément en panne.

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A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.