Pour Barclays, la BCE prend un risque inutile

En tardant à agir, la Banque centrale européenne prend le risque de laisser la déflation s’installer en Europe.

Jocelyn Jovène 02.04.2014
Facebook Twitter LinkedIn

Pour les économistes de Barclays, la Banque centrale européenne joue un jeu dangereux en faisant le pari que la reprise de l’économie européenne suffira à écarter tout risque déflationniste.

« La déflation est un risque asymétrique dont il est difficile de sortir », a averti mardi Fabrice Montagné, économiste senior chez Barclays.

Observant que Mario Draghi, le président de la BCE, ne cesse de changer de définition de la déflation tous les mois, l’économiste a rappelé que la menace déflationniste est bien réelle, en particulier si la France et l’Italie, qui contribuent à hauteur de 40% aux chiffres d’inflation, engageaient un processus d’ajustement structurel, avec un impact négatif sur des chiffres d’inflation déjà faibles (0,5% en zone euro).

« Nous sommes dans une reprise atypique en zone euro », a souligné Apolline Menut, économiste de la banque britannique. « Le rythme de croissance de l’économie est inférieur à ce qu’il devrait être dans une reprise classique », précise Fabrice Montagné, soulignant l’impact sur l’activité des pertes de richesse provoquées par la crise, lesquelles n’ont à ce jour pas été récupérées.

« Le problème de l’Europe est que la croissance n’a pour l’instant pas d’autre moteurs que l’atténuation des forces négatives qui avaient pesé sur elle », a ajouté Apolline Menut.

L’économie européenne est en effet dans une situation paradoxale, avec d’un côté une convergence des taux souverains à des niveaux antérieurs à la crise de la dette et une normalisation des coûts de financement (favorable aux banques), mais d’un autre côté pas de transmission du crédit à l’économie réelle.

La situation sur le front de l’inflation n’est guère meilleure. « L’output gap est toujours négatif ; les prix de vente des producteurs sont sous pression, les salaires réels baissent et le PIB de la zone euro est aujourd’hui 3 points de pourcentage inférieur à son niveau d’avant-crise », a constaté l’économiste de Barclays.

Au final, si le scénario de reprise économique n’entraine pas de mouvement de hausse des prix, la BCE sera contrainte d’agir, expliquent les économistes de Barclays. « Ne rien faire à court terme aura un coût en termes de communication de la banque », a conclu Fabrice Montagné.

Barclays prévoit une croissance de 1,3% en zone euro en 2014 et de 1,5% en 2015, tandis que l'inflation atteindrait 0,9% cette année et 1,1% l'an prochain.

Facebook Twitter LinkedIn

A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.